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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Drame au palais.

La vengeance du Prince Castor.

 

 

 

Jusqu'alors, le Prince Castor, coulait des jours heureux dans son palais d'ivoire et d'Or, baignant dans un luxe qui faisait saliver les seigneurs voisins, jaloux de sa prospérité et de cette vie fastueuse qu'il croquait à pleines dents. Tout du reste lui souriait en dépit des rumeurs qui circulaient ici où là, répandues par des êtres sournois, des langues de vipère.

Castor premier n'en avait cure, il savait se montrer incisif pour contrer ces viles attaques qui finissaient toujours en queue de poisson. Tenant d'une orthodoxie dans la gestion de sa cour, il s'appuyait sur son chambellan, véritable pivot de son pouvoir, pourchassant impitoyablement toutes les impuretés qui souillaient le palais en parodontologue avisé.

La tenue officielle de la cour ; il n'y avait aucune exception à la règle, était la couleur orange. Qui du reste voulait passer la brosse à reluire à ce monarque débonnaire, lui faisait offrande de ce merveilleux fruit juteux, en dépit de sa rareté dans cette principauté. Castor avait une lubie, un plaisir que seul un grand de ce monde peut s'offrir : chaque matin il prenait un bain dans le jus sucré des oranges reçues en cadeau la veille dans lequel il aimait à ajouter du carry.

Un visiteur moins averti des usages de l'endroit, fit offrande d'écorces d'oranges confites. Prince Castor fut surpris de trouver dans son bain ces paillettes étranges qui flottaient dans sa baignoire émaillée. Il en avala quelques-unes tandis qu'il faisait ses ablutions et ce fut le drame. Une écorce se coinça dans sa luette provoquant un étouffement qui entraîna une violente réaction des domestiques qui voulurent le tirer de ce mauvais pas.

Le Prince fut prestement évacué de ce bain louche, on le pendit par les pieds pour frapper violemment sur son dos. Le feu des joues indiquait désormais que le monarque passait au rouge. Il était urgent d'agir. Un valet de pied qui venait de faire un stage de secourisme se lança dans le bouche à bouche alors que Castor était dans le plus simple appareil. Détail anodin qui ne fut pas sans conséquence.

Un orthodontiste fétichiste notoire et homme de mauvaise vie, présent sur les lieux voulut faire un moulage de l'appendice princier tandis que le valet œuvrait. Le sauveteur, dérangé par cette action aussi scabreuse que parasite d'un mouvement de tête inopiné prit son dentier dans la mâchoire princière et lui arracha sa couronne.

La consternation se fit alors parmi l’assistance, craignant qu'en sortant de son malaise buccal, Castor ne découvrit ce qu'il allait prendre inévitablement pour un coup d'état, une tentative de renversement de son trône ce qui naturellement, ne manqua pas d'advenir. Le monarque retrouvant conjointement sa respiration et ses esprits découvrit la chose.

Il fut pris d'une rage folle. Une soudaine poussée d'aphtes accompagnait toujours ses colères. Le Prince Castor, la mâchoire serrée, le visage écarlate, prit dans l'instant une décision qui fit date dans sa principauté. Ses conseillers lui ayant souvent répété qu'il convenait de prendre le mal à la racine, imposa l'arrachage de toutes les dents de ses sujets : il avait pété les plombs !

On fit venir de toutes les régions environnantes des arracheurs de dents pour mettre à exécution sa redoutable vengeance. Nul ne put se dérober et toutes les dents de ses sujets furent ainsi regroupées devant le palais en un formidable tas. Le Prince Castor, en souverain avisé désira faire bon usage de ce sacrifice. Il demanda à ces architectes de jeter un pont par-dessus le fleuve. L'ouvrage fut baptisé « Bridge » pour des raisons qui échappent à ma sagacité.

Quant au fétichiste responsable de cet enchaînement malheureux, il fut pendu haut et court par là où il avait fauté puis son corps fut jeté aux chiens, les seuls désormais à disposer de canines dans le pays. La gastronomie locale dut se convertir aux bouillies sous toutes leurs formes et les rares visiteurs qui eurent le privilège de découvrir ce territoire prétendirent que tous les sujets du Prince Castor avaient tous mauvaise haleine et conservaient mystérieusement une dent contre leur tyran.

À contre-dent

 

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