De la violence à l'école …

En quête d'explications

On se pose bien des questions qui n'ont pas pas lieu d'être. Ainsi, nos grands bureaucrates sous les ordres d'immenses ministres s'interrogent régulièrement sur les raisons profondes de la violence à l'école. Ils cherchent la petite bête, l'explication qui ouvrirait les portes à un changement radical, à une pacification générale, une concorde retrouvée d'un simple coup de baguette magique. Mais pourquoi espérer ainsi que l'école échappe aux grandes tendances de notre société ?

Nous vivons une période chargée de violence, de mépris et de haine. Les modèles sociaux sont ceux de la guerre au travail ou plus exactement d'une douleur permanente. Harcèlements, brimades, réprimandes, pressurisations, pressions sont autant de techniques utilisées pour maintenir le travailleur en état de choc, bien loin des valeurs humaines qui firent jadis les délices de la solidarité de classe.

Ceux qui échappent au travail sont exclus de la société. On leur dénie toute honorabilité et la souffrance est plus forte encore. La sidération est l'état naturel des adultes, la considération l'exception . Alors, quand ces pauvres gens endossent les habits si complexes de parents d'élèves, ils ne peuvent plus concevoir les relations humaines que dans le registre du conflit. Comme de l'autre côté, les enseignants ou les responsables administratifs sont dans le même état, il est fort naturel que plus rien ne puisse se passer sereinement entre martyrs du labeur expiatoire.

Les enfants sont le réceptacle naturel de ses tensions fabriquées à dessein pour détruire ce monstre anachronique fondé sur la gratuité et l'égalité. (À l'évocation de ces deux principes fondateurs de l'éducation nationale on devine aisément à quel point elle ne peut satisfaire les tenants du libéralisme, du profit et de l'inégalité des humains, des races, des groupes sociaux.) Les élèves sont ainsi la force armée de nos casseurs d'idéaux.

Ils ont tous les droits. Enfants rois de la consommation nécessaire, ils se sont construits loin de toute idée de contrainte, ils ont cessé de se confronter à la frustration, action bien trop négative du point de vue commerciale. Ce qu'ils veulent, leurs pauvres parents doivent finir par leur acheter. L'école apparaît alors comme une aberration inacceptable, une entrave à leur appétit de liberté.

La loi vient à leurs secours pour renforcer cet appel délirant à l'illusion de la liberté de tout faire. Ils peuvent récuser une décision, s'élever contre une orientation, exiger des explications. Ils sont dans une situation de domination effective et finissent par le comprendre progressivement. Le pouvoir c'est eux et la pauvre école n'a plus qu'à mourir dans des soubresauts tragiques.

Ils sont reconnus comme consommateurs en chef. La loi interdit d'interdire de téléphoner dans un collège. Il faut absolument que les tenants de la téléphonie se gavent de la vacuité de milliers de messages sans importance, les législateurs bien serviles ou justement récompensés ont donné leur accord. Le flux des SMS, des messages stupides, des menaces, des photos compromettantes, des vidéos dégradantes peut ainsi donner libre cours à toutes les rancœurs.

C'est un élément de violence manifeste dans nos établissements, imposé par un loi au service de l'argent plus que de la raison. Il en va de même pour une multitude de petits éléments qui donnent le sentiment que le rapport de force n'est plus en faveur de la raison et du savoir. Il est interdit de brider le délire consumérisme, de s'interposer dans les choix vestimentaires qui engendrent pourtant tant et tant de troubles.

L'école est devenue le lieu de la soumission des adultes aux désirs des enfants, aux prétentions des parents, aux délires de l'état. C'est ainsi que la violence se nourrit de l'intrusion de la vie extérieure dans ce qui était jadis un sanctuaire. Le langage est le vecteur de cet appel d'air vicié il est exclusivement excrémentiel en ouvrant la porte à tous les conflits, toutes les algarades, tous les désordres, toutes les rixes dont il faudrait rendre compte maintenant.

Enquêtement leur