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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

L'incommunicabilité

La barrière de la langue est un enclos asinien

 

 

Il est illusoire de penser que les arcanes de l'esprit humain nous conduisent toujours vers la lumière. Entre le message transmis et sa compréhension, il y a bien des variables qui peuvent perdre en chemin nombre d'auditeurs. Le locuteur bardé de la certitude de se faire comprendre, risque fort de se leurrer cruellement tandis que son message se perd en cours de route à moins qu'il ne bifurque sur des voies de traverse.

Déjà ce préambule, s'il vous était lu à haute voix, risquerait fort de laisser sur le quai bien des gens au creux de la vague de ce flot de mots qui usent à plaisir de phrases complexes. Se contenter de la seule proposition principale est devenue le garde-fou du communicant de base tandis que celui qui s'aventure sur les subordonnées éparpillerait bien des gens.

Si la proposition relative accompagnée de son « qui » ne fera pas grand dégât d'éparpillement de l'auditoire, les autres pronoms, auxquels vous auriez recours, constitueraient une opération à haut risque. Mais rien n'est pire que la convocation des conjonctions de subordination comme si l'idée même d'établir une hiérarchie de cause à effet dans votre raisonnement n'était plus acceptable.

Il est donc acquis pour l'orateur que la phrase exige un dépouillement grammatical qui confine à l'ascèse. Ce n'est certes pas la seule exigence puisque votre vocabulaire a lui aussi un fort pouvoir de dispersion. Je n'en veux pour preuve que cette « ascèse » qui risque fort de ne pas faire écho. L'appauvrissement du lexique paradoxalement pousse certains hauts responsables politiques à sortir de leur chapeau des mots rares pour asseoir leur pouvoir. Mais eux n'ont pas l'ambition d'être compris, bien au contraire.

La conjugaison risque elle aussi de dissimuler des chausse-trappes sur votre propos. Question de mode, l'indicatif a désormais l'exclusivité pour peu que vous désiriez éviter le contresens. Encore faut-il ne pas sortir du présent et du passé composé tout en vous gardant bien de regarder vers le futur. Quant à l'usage des autres modes, il est presque suicidaire et vous reviendrait tel un boomerang avec des phrases sorties de leur contexte, sujettes sinon à  des interprétations fallacieuses.

Ce propos liminaire quelque peu abscons pour vous donner un exemple d'un petit conte de sagesse qui systématiquement laisse pantois une bonne partie du public. Car l'humour vient semer son grain de sel à la condition que le premier degré soit la règle et que le graveleux permette de s'accrocher aux branches. L'idée saugrenue d'entrer dans le mystère, l'absurde, le surréalisme ou le fantastique sera désastreuse en terme de compréhension collective.

Je vous propose pour éclairer vos lanternes, mon "maître" étalon du public qui me fait l'honneur de m'écouter. Ce petit récit travesti dans un contexte vernaculaire est un conte de sagesse issu des traditions anciennes. Il a depuis les lendemains de la nuit des temps fait sourire bien des participants lors des veillées. Aujourd'hui, sa forme d'humour, laisse sur le carreau la moitié d'entre nous. C'est un marqueur de l'affadissement cognitif de notre société que les résultats à l'enquête Pisa confirment de manière éclatante. Mais trêve de palabres inutiles, je vous laisse juge de votre propre rapport aux circonlocutions langagières d'un bonimenteur.

Berlaudiot est un bon voisin à la condition de n’avoir pas besoin de lui demander un service. Pourtant ce jour-là, Archimède, le plus pauvre du village vint vers lui. Le malheureux avait absolument besoin d’un âne pour porter du blé au moulin. Il avança humblement vers Berlaudiot et le plus poliment du monde lui demanda si par bonheur il pouvait lui prêter son âne.

Berlaudiot de se désoler, levant les bras au ciel et de répondre : « Mon Brave Archimède, me voilà bien ennuyé mais mon épouse est partie ce matin avec notre bourrique pour se rendre au marché. Ça aurait été avec grand plaisir que je vous aurais rendu ce petit service »

Archimède s’en retourna chez lui. Il n’avait pas parcouru deux cents mètres qu’il entendit braire un âne, qui à n’en point douter était celui de Berlaudiot. L’homme fâché revint chez son voisin afin de lui signifier son mécontentement. Berlaudiot de lever les bras au ciel, de s’indigner, de montrer du doigt l’importun : « Quelle déception mon voisin. Vous me traitez de menteur car vous croyez davantage mon âne que moi ! »

Est-ce les mots employés ou bien la tournure d'esprit qui prévaut à la chute absurde qui mettent sur la touche nombre de spectateurs à moins que ce ne soit l'impossibilité d'écouter vraiment ou bien encore l'usage intempestif d'un perturbateur modulaire ? Je laisse juge ceux qui sont parvenus jusqu'à ce point final.

 

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F
Bonjour, j'ai ri à l'histoire de Berlaudiot : je ne suis pas encore perdue !<br /> Petits passages à corriger comme suit :<br /> nombre d’auditeurs (d' au lieu de des)<br /> voies de traverse (traverse au singulier)<br /> précédée du « qui » : incorrect. Préférer introduite par « qui » (car le "qui" fait partie de la proposition relative) <br /> grand dégât (c'est au singulier sinon écrire "de grands dégâts")<br /> enlever la virgule avant "éparpillerait bien des gens"<br /> les autres pronoms, auxquels vous auriez recours,... rajouter une virgule après pronoms<br /> comme si l'idée... n’était plus acceptable (après si on utilise l'indicatif).<br /> cette « ascèse » : le mot est féminin<br /> Mais eux, n'ont pas l'ambition : enlever la virgule après eux<br /> contre sens s'écrit en un seul mot : contresens <br /> à des interprétations fallacieuses : rajouter des sinon laisser au singulier<br /> mon maître étalon du public : il s'agit du mètre pour mesurer donc "mon mètre étalon"
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C
Florence<br /> <br /> écrire de cette manière c'est prendre le risque de la faute, de la tournure impropre également. Je te remercie