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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Un billet qui n’est pas sans fondement.

Le torche-cul : acte fondateur

 

Grand raconteur des latrines, feuillets, cabinets et autres tinettes bien avant que la toilette sèche se pare d’une modernité qui fleure bon, me vient soudain en tête la préoccupation essentielle de savoir comment faisaient les anciens pour rétablir la netteté de leur fondement après un usage qui laisse immanquablement quelques traces. Je devine que certains vont pincer le nez et fuir dans l’instant ce papier fort peu hygiénique. Qu’importe, pour les autres, voilà un sujet qui restera dans les annales.

Les archéologues et préhistoriens sérieux demeurent pantois et un peu circonspects sur le sujet. Nous ne savons rien des pratiques des hommes des cavernes à ce propos ce qui autorise mille supputations. Il convient de reconnaître qu’il est mal aisé de les suivre à la trace et que nous manquons cruellement de témoignages. Il faut laisser filer la frise historique pour aller y regarder de plus près chez nos amis les grecs anciens.

Ils furent les premiers à mettre le doigt sur ce délicat problème tout en précisant par le truchement de prosateurs aventureux et versificateurs espiègles que la pierre n’était alors pas d’achoppement mais bien d’échappement. Deux techniques donc, pour ce que nous en savons, s’opposent, celle du doigt auquel il est recommandé de couper les ongles ou bien de cailloux lisses qui serviront de grattoirs. La fracture sociale fait déjà son œuvre et les plus aisés s’autorisent l’usage du poireau pour remplir la tâche.

Malgré tout, comme le déplore amèrement Homère, le commun se contente de ne rien faire, confiant à ses braies et chemises, la délicate mission d’absorber les surplus. Les gueux ne brillent guère dans les assemblées et sur l’agora quand des traces merdeuses expriment mieux que leur éloquence, les signes de leur indignité sociale.

Rome a naturellement poussé le raffinement à se munir de latrines publiques et collectives. Il fallait bien que le problème de la virgule soit abordé afin de rendre supportable la promiscuité. Évacuons l’éponge imbibée d’eau évoquée par Montaigne dans un essai fort peu concluant, pour se pencher sur les serviettes en tissu et parfois en laine. Dans la bonne société, on pousse le détail si loin que la lingette est parfumée.


Les époques se succèdent sans que la littérature se penche véritablement sur le sujet. Il est bon de rappeler que c’est le renard qui a eu les honneurs du premier roman et non pas le pet foireux. On sait seulement qu’au Moyen-Âge c’est un bâton courbe qui permet d’effacer le plus gros du boulot tandis qu’une poignée de foin, de feuilles ou de terre assure le fignolage anal. Notons que les Chinois étaient en la matière fort en avance sur l’Europe puisqu’ils mettaient depuis longtemps le bâton au bord du trou.

C’est encore du côté de l’Empire du Soleil que le papier vient effacer les preuves à partir du XIVème siècle ceci, il convient de le préciser pour un usage strictement impérial. L’auguste derrière disposait là d’un privilège fort onéreux. En France, à la même époque, c’est la filasse, l’étoupe de lin ou de chanvre qui vient caresser les fesses de Charles VI en 1398.

Le bon peuple quant à lui doit se démerder comme il peut, usant le plus souvent des ressources naturelles. Les feuilles puis le bas de la liquette achèveront une action commencée manuellement. Il ne fallait pas faire la fine mouche, à l’époque et le tout allait engraisser la terre dans le souci d’un cycle naturel poussé à l’extrême.


Rabelais en rajoute quelque peu sur le sujet et comment s’en étonner de la part de ce lascar mal-embouché et sujet aux flux de ventres. "Pour conclure, je dis et je maintiens qu'il n'y a pas de meilleur torche-cul qu'un oison bien duveteux, pourvu qu'on lui tienne la tête entre les jambes. Croyez-m'en sur l'honneur, vous ressentez au trou du cul une volupté mirifique, tant à cause de la douceur de ce duvet qu'à cause de la bonne chaleur de l'oison qui se communique facilement du boyau du cul et des autres intestins jusqu'à la région du cœur et à celle du cerveau. Ne croyez pas que la béatitude des héros et des demi-dieux qui sont aux Champs Élysées tiennent à leur asphodèle, à leur ambroisie ou à leur nectar comme disent les vieilles de par ici. Elle tient, à mon avis, à ce qu'ils se torchent le cul avec un oison…"

à suivre ….

Culbutement vôtre.

 

 

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