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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Avec les Fous de Bassan

Une répétition de la chorale

Avec les Fous de Bassan

Avant le spectacle

 

L’existence réserve parfois de belles surprises, nées d’une rencontre impromptue, d’une heureuse coïncidence, d’un concours de circonstances qui sont sans doute l’œuvre d’un ange gardien, curieusement bien intentionné. La chose est suffisamment rare dans la corporation, il convient de ne pas trop l’ébruiter afin que Saint Pierre ne lui tire pas sur les plumes…

C’est ainsi qu’il se trouve de manière totalement inexplicable pour un esprit rationnel que la chorale des Fous de Bassan, située à 400 kilomètres de chez moi, a dans son répertoire deux chansons dont je suis le parolier et j’espère bientôt deux autres. C’est tout d’abord un immense bonheur que d’entendre un texte sorti d’une imagination certes fertile mais sans doute pas en parfaite harmonie avec les redoutables exigences de la versification, bonheur que d’autres amis m’ont déjà accordé mais plus encore, une véritable offrande quand le texte est orchestré pour trois pupitres qui ne chantent pas à l’unisson.

J’avoue là un émerveillement tout autant qu’une infinie reconnaissance pour ceux qui furent à l’origine de ce don du ciel tant leurs voix sont divines. C’est donc avec plaisir que j’ai pu assister à une répétition juste avant un concert offert dans un EHPAD. J’avais fait le voyage, profitant d’une opportunité sur mon calendrier parce que j’avais reçu la proposition de participer avec eux à un concert caritatif pour des enfants malades. Je n’avais nulle intention de venir les mains dans les poches, il m’appartenait de caler mes interventions dans la logique d’une programmation à déterminer.

Tandis que j’écrivais ces propos liminaires, le chœur avait réalisé quelques vocalises avant que de débuter, instrumentistes en appui, le premier chant, Escale, qui symbolise si parfaitement l’esprit de cet ensemble marin. Puis le Mousse, mon second texte était au programme, histoire de faire honneur à ma visite. J’allais découvrir non sans émotion ce qui avait été fait de ce poème nostalgique.

L’accordéon et les deux guitares ouvraient le bal. Les basses entonnant le premier couplet. Les femmes leur donnant la réplique. Puis ce jeu de va-et-vient aurait pu continuer comme une partie de ping-pong quand la magie de l’adaptation fit résonner trois voix différentes. J’avais le cœur en capilotade et plus encore quand je vis les spectatrices fidèles du groupe, reprendre elles aussi les paroles qu’elles maitrisaient sur le bout des doigts.

La miracle avait lieu. Je voyais le mousse éperdu, les clapots et le vent du large. La nostalgie suintait non pas comme un fardeau dont il faut se dégager mais bien comme une rengaine qui colle à l’âme. La musique a su rendre compte de cette fatalité poisseuse qui fait que les victimes ont tendance à reproduire à leur tour les avanies qu’elles ont subies. Il importait cependant de ne pas larmoyer, de donner une place à l’espoir dans ce récit sombre.

Puis, les Paludiers furent à l’honneur. J’avais entendu une première interprétation lors d’un concert au Pouliguen cet été. Cette fois, les paroles se détachaient, elles pouvaient être comprises, tandis que l’orchestration plaçait clairement ce chant dans une tradition entraînante, un rythme qui donne envie de prendre les outils et de suivre les paludiers dans leurs œillets.

Dans l’après-midi, j’avais eu le privilège d’écouter les deux autres chansons, fraichement mises en musique par Jean-Jacques. Ne leur restait plus qu’à passer le test du contrôle collectif avant que de se transformer dans les mains de Nathalie, la chef de Chœur. Les choristes ignoraient tout encore de ce travail. Je devais garder ce plaisir pour moi seul, une frustration pour celui qui est toujours trop pressé.

Il me restait alors à suivre attentivement la suite de la répétition. Le Voilier Noir fendait les flots, lui aussi avec la force de l’inéluctable destin des gens de mer. Cette fois, les corrections vont dans le détail. La nature même de l’expression, la tonalité, la couleur dans la voix du pupitre féminin sont infléchies. Le travail se fait pointilleux ; une véritable horlogerie de grande précision. Cette fois, ce sont les musiques qui sont sollicitées. Ils doivent trouver une liaison, une virgule qui assurent la transition.

L’humour n’est pas exclu de la séance. Une petite saillie, un éclat de rire et la tension née des deux ou trois remarques précédentes s’envole comme par magie. En dépit de l’exigence chirurgicale, cela doit rester un plaisir, un loisir qui demande, à n’en point douter beaucoup d’implication personnelle. Bien sûr, il faut recommencer souvent, accepter que parfois les voix sortent du sillage fixé, que le vent souffle par côté, occasionnant quelques dérives malencontreuses. Tous ici sont amateurs ce qui n’empêchent nullement qu’au final, le spectacle sera de toute première qualité.

Tout au long de la séance, Nathalie corrige, modifie, suggère de prendre un ton au-dessus. Michel et Jean-Jacques obtempèrent sans rechigner avec une facilité déconcertante. La musique est un art vivant et il n’est d’autre manière d’en profiter qu’ainsi. N’hésitez pas à venir les écouter !

Admirativement leur.

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