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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Souffler sur les braises !

Ami, dessous la cendre …

L'humain est ainsi fait qu'il revient vite aux gestes les plus archaïques de son histoire. La peur de manquer sans doute ou bien de passer à côté d'une grande catastrophe, dès qu'il voit un petit foyer, une source de querelle ou bien de désaccord, il lui faut souffler sur les braises afin de ranimer les vilaines flammes.

 

Il y a naturellement toujours quelques personnes bien intentionnées pour être de mèche avec le souffleur ou bien informer du vent mauvais qui vient d'en face. Le soufflé ainsi, n'est pas près de retomber, les braises ne demandent qu'à rougeoyer à nouveau pour que repartent les flammes. Il n'est d'ailleurs pas surprenant qu'un parti politique, spécialiste de la chose, arbore fièrement un flambeau comme oriflamme.

 

À la première étincelle, tous les boutefeux se sauvent : le courage n'est pas leur fort, reconnaissons-le. D'autres, plus retors, critiquent par derrière, font du petit bois en sciant la branche sur laquelle les protagonistes sont assis afin d'alimenter le feu. Comment les faire stère ? Telle est la question qui jamais ne se pose. Les flammes attirent les moustiques et ne repoussent jamais les bêtes sauvages.

 

Devant les spectateurs attirés par la clarté, les protagonistes ne sont pas en reste. « Tu vas voir de quel bois je me chauffe ! » hurle le premier quand le second réplique, piqué au vif :« Ne me chauffe pas les oreilles ! ». Nul ne viendra jeter de l'eau sur le feu, bien au contraire ; nombreux sont ceux qui ajouteront leur grain de sel, sachant qu'il n'est pas plus sûr moyen pour activer le feu.

 

Le feu qui avait couvé longtemps donne alors naissance à un vilain dragon. Celui-ci va courir dans les cœurs et les parages ; il va se faufiler partout pour rallumer ce feu où se consumait l'espoir et ravage tout ce qui avait été patiemment construit. Si ses flammes lèchent, c'est loin d'être une caresse, elles détruisent et laissent cendres et désolation derrières elles.

 

Le feu gagne toujours la partie. Il n'y a pas à revenir sur cette évidence. Il tient de la beauté du diable, la fascination que nous lui vouons est digne du baiser de Judas. À la moindre imprudence, au plus léger coup de vent, le feu s'émancipe, se libère de ses entraves pour courir la plaine, filer sa route destructrice. Il emporte tout en un ultime brasier.

 

Dessous la cendre, le feu a tout brûlé. Les amitiés carbonisées, les espoirs détruits ne sont plus que poussière. Si la cendre permet parfois d'enrichir la terre, elle scelle pourtant l'urne des souvenirs. Nulle trace de ce qui fut dans ce qui va renaître. C'est un nouveau paysage qui sortira des coulées de larmes incandescentes. Dragons et volcans sont les deux mêmes faces de notre côté obscur.

 

Avant qu'il ne soit trop tard, il est préférable d'écouter ceux qui ont une petite flamme dans les yeux, un rayon de lumière et de douceur. Ils sont les maîtres de la vie quand les autres sont les compagnons de la camarde. Les feux de l'enfer ne réchauffent pas les cœurs. La clarté est préférable ; celle qui émane des êtres de lumière, ces rares individus qui montrent le chemin sans jamais se départir de leur bonté.

 

Laissons donc les braises tranquilles ; elles ont fait assez de ravage jusqu'à présent. Il faut que les humains retrouvent enfin la paix et la fraternité. Il leur faudra alors renoncer aux flambeaux, porte-flammes, chandeliers aux multiples branches, cierges et candélabres, flamme olympique et mémorielle. Tous sont porteurs des prémices d'un nouveau brasier.

 

Au feu, préférons désormais l'eau. C'est d'elle que vient la vie ; c'est elle qui est indispensable à notre survie, c'est encore elle qui est menacée par le feu dévorant de notre réchauffement climatique. Cessons d'être des individus primitifs. L'ère du feu doit être révolue : ouvrons la civilisation de l'eau.

 

Pyromanement vôtre.

Souffler sur les braises !

Ami, dessous la cendre

 

Serge Utgé-Royo

 

 

{Refrain:}
Amis, dessous la cendre
Le feu va tout brûler
La nuit pourrait descendre
Dessus nos amitiés

Voilà que d'autres bras tendus
S'en vont strier nos aubes claires
Voilà que de jeunes cerveaux
Refont le lit de la charogne
Nous allons compter les pendus
Au couchant d'une autre après-guerre
Et vous saluerez des drapeaux
En priant debout sans vergogne

{au Refrain}

La nouvelle chasse est ouverte
Cachons nos rires basanés
Les mots s'effacent sous les poings
Et les chansons sous les discours
Si vos lèvres sont entrouvertes
Un ordre viendra les souder !
Des gamins lâcheront les chiens
Sur les aveugles et sur les sourds

Je crie pour me défendre
"A moi, les étrangers !
La vie est bonne à prendre
Et belle à partager"

Si les massacres s'accumulent,
Votre mémoire s'atrophie
Et la sinistre marée noire
Couvre à nouveau notre avenir
Vous cherchez dans le crépuscule
L'espérance de la survie
Les bruits de bottes de l'Histoire
N'éveillent pas vos souvenirs

{au Refrain}

Je crie pour me défendre
"A moi, les étrangers !
La vie est bonne à prendre
Et belle à partager"

{au Refrain}

Souffler sur les braises !
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