8 Avril 2012
Acte 1
Rien à voir …
Après deux meetings du Front de Gauche, je retrouve avec curiosité une réunion publique du parti socialiste. L'ambiance est feutrée, j'ai l'étrange sentiment d'être à quelques minutes des trois coups dans un théâtre de boulevard. Nous sommes bien loin de la ferveur de la maison d'en face. Ici, tout est plus policé.
Le cheveu poivre et sel est de circonstance. La tenue se fait discrète, le rouge ne s'affiche pas avec la même ostentatoire détermination que chez les voisins turbulents. Seule, la presque totale éradication de la cravate atteste encore que nous ne sommes pas dans un meeting de l'UMp. L'âge moyen ne permet pas de croire au renouvellement des sympathisants. Nous sommes très nombreux dans la fourchette 45 – 65 ans.
Quatre énergumènes agitent des drapeaux et tentent vainement de réveiller l'assistance. Ils crient « François Président ! » vieille rengaine d'un autre temps. Personne ne leur emboîte la voix. Ils se replient sur un plus martial « Tous ensemble, tous ensemble, So-CiA-LISTE » qui fait aussi peu recette si ce n'est quelques applaudissements de politesse.
Il y a bien loin de ce que j'ai pu observer à Saran ou à Vierzon. Le public est calme, d'une distinction sans faille, d'une étrange somnolence. Ce n'est pas demain le grand soir ! La salle pourtant est bientôt pleine. On installe à la hâte quelques chaises supplémentaires pour finir sans doute par une assistance d'un peu moins de 300 personnes. Le Parti semble avoir le vent en poupe.
Le quatuor énervé continue d'hurler. Voix stridentes, ritournelles inchangées, ils finissent par lasser. C'est justement le moment choisi pour l'entrée en salle des vedettes du soir. Pas de musique, ni de tambour, simplement la claque qui reçoit enfin un maigre écho et des applaudissements saccadés, bien loin d'une charge héroïque !
C'est une conseillère de Semoy qui, en l'absence de monsieur le Maire, en voyage à l'étranger, ouvre le bal. C'est étrange, j'ai l'impression de me retrouver, bien des années en arrières, dans une église, avec une dame patronnesse, qui lit son compliment à Arnaud Montebourg. Elle fait traîner ses mots avant chaque ponctuation, elle psalmodie plus qu'elle ne parle. Ce n'est pas ridicule, Noëlle est sincère, c'est simplement déplacé.
Je retouve alors Olivier (ils s'appellent tous par leurs prénoms dans la grande confrérie des partis politiques) , le secrétaire départemental du PS. Il n'a pas progressé depuis la dernière fois. Il accumule les « euh », il débite à un rythme endiablé, il bafouille, il s'embrouille. Il nous déclare, enthousiaste que l'état de la dette se désintègre. Nous voilà rassuré. Il sert du « Arnaud » en veux-tu en voilà, à la vedette du soir avant que de donner le micro, à celle qui sera, personne n'en doute ici, la députée de la sixième circonscription : « Valérie ! »
Valérie nous promet un petit discours sur l 'économie. J'ai l'impression d'assister à un exposé bien troussé d'une jeune lycéenne un peu troublée. Les mots vont en cascades, la voix est claire mais tout va si vite qu'il est bien difficile de suivre le fil d'un texte pourtant précis et rigoureux. Pas de place à la fantaisie, au slogan, à la saillie, c'est scolaire, c'est dense, si compact même que les têtes grises, devant moi dodelinent ou s'affaissent.
Aucune respiration, aucun temps fort. Jamais la moindre place au plus petit applaudissement. Toujours cette absence de chaleur dans une voix qui ne sort jamais de son registre monocorde. Quel a été le contenu précis de ce texte roboratif, je ne sais. Même monsieur Montebourg, assis à côté de l'oratrice, semble avoir décroché. Il feint, à moitié, l'attention inspirée, il est manifestement ailleurs. Quand notre Valérie en termine, des applaudissements polis récompensent cette prestation qui fut une épreuve pour beaucoup d'entre nous.
À suivrement leur.