Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
26 Avril 2025
Faute d'eau, il est permis de s'y noyer dans d'autres verres…
Jusqu'alors la capitainerie en Orléans se désespérait de ne pas servir à grand-chose. Elle avait beau ouvrir ses vantaux, ses portes n'ouvraient sur aucune échappatoire, son bief sombrant dans une pauvre impasse aqueuse. L'installation est pourtant là pour rappeler le glorieux passé de la Marine de Loire quoiqu'en son temps, le canal d'Orléans depuis 1692, se jetait en Loire à Combleux, à 5 km de là.
Puis l'histoire a voulu repasser les plats en une époque où la navigation fluviale avait sombré dans les vapeurs d'un chemin de fer bien trop ponctuel pour rivaliser avec lui. Le fameux bief a été percé sur le lit même de la rivière à partir de 1908 en une période où les hommes se sont rapidement attachés à percer des tranchées bien plus que des canaux.
Achevé en 1920, la malheureuse jonction urbaine n'eut que ses yeux pour pleurer quand elle fut fermée en 1958, se desséchant dans un terrible oubli. Il fut même en partie bouché pour accueillir une piscine qui fit quelque temps la joie des ligériens avant qu'un pont jette une ombre mortelle sur ses bassins.
C'est alors qu'un maire au pied marinier se mit en tête de croire à l'impossible en anticipant sur la réouverture hypothétique du canal d'Orléans. Le bief fut à nouveau percé puisque l'échevin se berçait d'illusions. L'espoir tomba à l'eau tandis que la Capitainerie se desséchait piteusement. C'est alors que germa l'idée d'y adjoindre une guinguette d'été dont la première version opta pour un patronyme qui rebuta l'esthète que je suis : le bouiboui.
Le succès public pourtant fut au rendez-vous, preuve s'il en est qu'on attrape aisément les mouches avec du vinaigre en cette bonne cité. Quand le moment arriva de changer de main, un entrepreneur entreprenant et suffisamment malin pour que je le qualifie de roublard sympathique et honnête, emporta haut la main l'appel d'offre pour nommer l'endroit : La guinguette de la Capitainerie.
Fort de son expérience marinière, notre ami a la ferme intention d'associer son estaminet avec la tradition batelière de l'endroit et les différentes compagnies qui y seront toujours les bienvenues. Du vin de Loire sera au rendez-vous pour satisfaire les gosiers chauvins tandis que la table n'hésitera pas à trouver le cap en regardant une étoile voisine.
Pour se démarquer de ses prédécesseurs, il n'hésitera pas à animer sa guinguette, proposant même à votre serviteur de tenter de satisfaire une clientèle qui vient ici goûter le plaisir de se trouver en bord de Loire et du canal. Le risque est grand de casser les oreilles à défaut des verres à pied à des groupes qui sont attablés pour jouir du bonheur de la discussion à bâtons rompus.
Je vais tenter l'expérience en y allant sur la pointe des pieds. C'est ce que souhaite l'ami Axel qui en sus de cette nouvelle expérience continuera de faire le passeur pour gagner la base de loisirs qu'on nomme désormais le Parc de Loire : Charlemagne a une fois encore perdu sa couronne et son Île alors que son-petit fils Charles II le Chauve fut couronné dans cette ville bien oublieuse.
L'histoire bien trouble de la ville qui à plusieurs reprises eut pu croire en sa bonne étoile afin de devenir Capitale du Royaume de France, mêlée à celle d'un fleuve royal qui fut détrôné par la Seine, mérite bien une nouvelle estrade sur La Loire à défaut d'un ponton qui préfère les douces mélopées des flots et des musiciens.
Le nouveau Capitaine m'invite à parler de lui, que ce soit en bien ou en mal, l'essentiel pour lui est de passer sur les fourches caudines d'un bonimenteur qui ne donne pas dans la dentelle. N'étant pas d'humeur badine, je lui fais offrande de ce billet qui n'a rien de piquant. Je garde mes sornettes pour ses futurs clients dominicaux...