20 Janvier 2011
Comment continuer à jouer sans ramer …
A propos d'une défaite de plus et d'un billet la relatant, Fly Half
m'envoyait un peu durement dans les cordes avec ce commentaire : « Ce lyrisme, certes bien écrit, magnifiant la défaite, un peu comme on l'a fait pour
Poulidor, me gonfle. A ce jeu, on est premier ou deuxième ! Et quand on est deuxième, on est des loosers ! Il n'y a pas de loosers magnifiques, il n'y a que des loosers … Le propre de tout
compétiteur, c'est une haine viscérale de la défaite... Je pense qu'un entraineur doit aussi inculquer cela à ses ouailles. Le jeu ne fait pas tout, et surtout pas la victoire.
»
Ma première réaction fut de me vexer, de répondre de façon abrupte puis nous nous en sommes expliqués. Cependant, la première remarque de ce sportif que je dois retrouver
autour d'une coupe de champagne en fin de saison, m'a donné envie de décrire cette situation de l'intérieur.
Peu de clubs peuvent échapper à ces saisons où rien ne va, où manifestement le niveau n'est pas tout à fait au rendez-vous, où les joueurs sont usés par les campagnes
précédentes, les désillusions qui cassent le moral, le poids des années quand le renouvellement n'est pas assuré. Nous avons le malheur de vivre cette année de trop, cette année sans victoire ou
si peu.
Les raisons seraient fort longues à évoquer dans le détail. J'ai naturellement ma part de responsabilité et je ne suis pas homme à nier mes fautes. Je pense surtout que cette
rupture s'inscrit fortement dans le contexte local où les handicaps sont largement supérieurs aux points forts.
La gestion municipale de la mise à disposition des installations n'est pas de nature à favoriser une éclosion sereine d'un club ambitieux mais n'explique nullement le malaise
actuel. Il faut, à mon avis regarder du côté du club phare pour apporter des explications de fond.
D'une part, les années Mustang ont décimé les rangs de nos jeunes quand en cadet ils s'en allaient rejoindre cette entente « licencivore ». Les garçons ne revenaient pas, le
taux d'abandon a atteint parfois le niveau absurde de 100 %. Nous payons encore ces années de plomb sans aucun renouvellement des cadres de l'intérieur?
D'autre part, ce club a inculqué à ses troupes pendant de longues années l'habitude de récupérer monnaie sonnante et trébuchante en jouant au Rugby. Nourrit au biberon de la
prime de match ou du fixe, les réservistes d'alors ne bougeaient pas, préférant le confort à l'aventure onéreuse à proximité. Sans apport de joueurs d'expérience, la stagnation était inévitable.
Il faut ajouter le peu d'attractivité du championnat Honneur et nous sommes restés dans une consanguinité qui a fini par appauvrir nos capacités de survie à ce niveau.
Alors, c'est acquis, cette année sera l'année de la descente. Comment faire avec un diagnostic qui ne relève pas de la nostalgie Poulidor mon bon Fly Half, mais bien d'une
analyse lucide des forces en présence ? Rester dans une logique de compétiteur comme je l'avais fait durant les deux années dorées du Cercle ? Certainement pas parce qu'à cette heure, les
effectifs seraient peau de chagrin.
Il est de la responsabilité de l'entraîneur confronté à cette situation pénible d'envisager la suite, de mettre en avant des critères humains, de ménager la chèvre et le chou,
de ne point demander l'impossible et de prendre patience pour investir sur la saison à venir. C'est ce que je m'évertue à mener, maintenir des entraînements agréables et construits, faire
progresser ceux qui ne sont pas pour l'instant au niveau, inculquer une culture Rugby, préserver l'âme du groupe malgré les défaites qui s'accumulent.
Oui mon cher Fly Half, cette situation est pénible, elle me pèse énormément mais je ne compte pas baisser les bras. Nous abordons chaque match avec l'espoir de le gagner mais,
et la nuance est de taille, pas à n'importe quel prix. Il est hors de question de ne pas faire rentrer tous les joueurs et chacun a droit à un peu de temps de jeu. Il n'est pas admissible de
sacrifier la réserve et il faut penser aux deux formations lors de la répartition des groupes.
Le pari sur l'avenir passe aussi par le jeu. La victoire à la mailloche, dans notre situation est parfaitement contreproductive. Il faut du contenu, ce qui n'exclut par le
combat, donnée incontournable dans notre sport. Voilà comment j'essaie de maintenir le cap sur cette galère où chacun essaie vraiment d'aller dans le même sens pour aborder des jours meilleurs en
gardant le sourire et de la dignité dans la défaite..
Dignement vôtre