Par un affreux concours de circonstances, un curieux hasard de la vie du joueur de bonne société, je me vis contraint de reconnaître mon ignorance face à l'une de ces
questions essentielles qui jalonnent les parcours ludiques de nos soirées au coin du jeu !
Il fallait dire à la joyeuse bande qui se pressait autour d'un planisphère parsemé de pions et de dés, en quelle année avait été renversé le dernier empereur d'Iran. Les mystères de la dynastie des
Pahlavi m'échappaient alors et sottement je donnai ma langue au Shah.
L'affaire eut pu en rester-là mais par un malheureux concours de circonstances je me retrouvai immédiatement pris d'un terrible mal de gorge, d'un enrouement à ne plus pouvoir parler : j'avais un
chat dans la gorge, un chat de gouttière qui avait pris ma trachée artère pour une tuyauterie en zinc. Tout le monde peut se tromper !
L'animal étant assez matou, il ne comptait pas en rester là. Il fit quelques entrechats pour percer les mystères insondables de mon intimité. Le mal empirait, je souffrais mille-morts et compris
bien vite que j'avais à faire au terrible chat noir ! Les jeux étaient faits, j'abandonnai la partie.
Il me fallait pourtant promptement me débarrasser de l'intrus. J'en appelai aux bonnes vieilles méthodes de nos grands mère et j'entrepris de tirer le chat par la queue. Que croyez vous qu'il se
passât ? L'impétrant sortit tel un diable de sa boîte, toutes griffes dehors, prêt à bondir sur la moindre proie.
Le temps tout juste de le dire, son forfait était déjà accompli. C'est horrible et c'est à peine si j'ose vous le dire, le chat malotrus avait dévoré la souris de mon ordinateur. Les mystères de
l'homophonie sont insondables, la chose fut pourtant parfaitement véritable !
L'objet étant du dernier cri, il ne put pousser le sien. Le monstre profita d'un trou de souris pour pénétrer dans mon disque dur. Il y fit alors un carnage plus effroyable encore que le plus
vilain des virus. Échappant à toute logique, il s'en prit d'abord aux logiciels, il fit ses griffes sur les volets déroulants de mes fenêtres ouvertes. Il allait poursuivre ses forfaits quand une
grande vague l'emporta.
Le chat surfait maintenant sur la toile. Il se faisait chat persan, juste retour des choses me direz-vous et découvrait les mystères du monde entier. Il pénétra dans les arcanes d'une télévision
commerciale qui depuis ce triste jour est astreinte à se dénommer « télé à chat ».
Il y fit le pitre tant et si bien qu'il poursuivit son aventure dans un livre ouvert. Au premier chapitre, il découvrit une paire de bottes qu'il s'empressa de chausser. La technologie fait des
bonds de géant et mon chat se retrouva dans un puits sans fond, celui de mes ignorances. Il y trouva une jeune fille qui se fit appeler Alice.
Immédiatement, le chat et la petite fille traversèrent l'écran de mon moniteur. Tout naturellement Alice vint s'installer à la table de jeu, le chat redevenu charmant sur les genoux. Le plus
incroyable, c'est que mes camarades trouvèrent la chose tout à fait normale et poursuivirent la partie comme si rien ne s'était passé.
J'aurais pu avaler mon chapeau, je préférai le poser sur ce maudit chat afin de ne plus le voir. À ce moment-là, il me fit un clin d'œil. Intrigué, je soulevai immédiatement mon galurin et
savez-vous ce qui en sortit ? Un lapin blanc ! Alice parut très soulagée que les choses rentrassent dans l'ordre….
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Cher BR un petit extrait d'alice au pays des merveilles pour une lecture au coin du feu ( ou de vottre radaiteur )...<br />
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On peut aimer les chiffres et avoir une imagination débridée. Le mathématicien Lewis Carroll dont on fête le centenaire de la mort aura ravi des générations par la fantaisie de son Alice.<br />
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Alice commençait à s'impatienter sérieusement, de rester assise sur la berge à côté de sa sœur, et de n'avoir rien à faire: une fois ou deux, elle avait plongé un coup d'œil furtif dans le<br />
livre que lisait sa sœur, mais il ne contenait ni images ni conversations, et «à quoi ça sert, songeait Alice, un livre sans images ni conversations?» Aussi était-elle en train d'évaluer,<br />
dans sa tête (dans la mesure du possible, car cette journée caniculaire la rendait toute somnolente et languissante), si le plaisir de fabriquer une guirlande de pâquerettes vaudrait la<br />
peine de se lever pour aller cueillir des pâquerettes, quand tout à coup un Lapin Blanc aux yeux roses vint à passer auprès d'elle en courant.<br />
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Rien de particulièrement remarquable à cela; rien, non plus, pour Alice, de particulièrement extraordinaire dans le fait d'entendre le Lapin marmonner: «Oh là là! Oh là là! Je vais être en<br />
retard!» (quand elle y repensa par la suite, elle s'avisa qu'elle aurait dû s'en étonner mais, sur le moment, tout cela lui parut parfaitement naturel); mais quand, ni plus ni moins, le<br />
Lapin tira une montre de son gousset, la consulta et repartit de plus belle, Alice se leva d'un bond, sur la révélation subite qu'elle n'avait encore jamais vu de lapin doté d'un gousset ou<br />
d'une montre qu'il en pût tirer; brûlant de curiosité, elle courut à sa suite à travers le champ, et elle arriva juste à temps pour voir l'animal s'engouffrer dans un acul de belle taille,<br />
situé sous la haie.<br />
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L'instant d'après, à sa suite s'y engouffrait Alice, sans se demander le moins du monde comment elle en pourrait ressortir.<br />
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Le terrier partait d'abord tout droit comme un tunnel, puis plongeait brusquement; si brusquement qu'Alice n'eut pas une seconde pour songer à se retenir avant de se retrouver en pleine<br />
chute le long de ce qui avait toutes les apparences d'un puits très profond.<br />
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De deux choses l'une: le puits était très profond, ou la chute très lente, car Alice eut tout loisir, dans sa descente, de regarder autour d'elle et de s'interroger sur la suite des<br />
événements. En premier lieu, elle essaya de regarder en bas pour se faire une idée de ce qui l'attendait, mais il faisait trop noir pour y rien voir; ensuite, elle regarda les parois du<br />
puits, pour s'apercevoir qu'elles étaient tapissées de placards et de rayons de bibliothèque: de place en place elle vit, accrochées à des chevilles, des cartes géographiques et des<br />
gravures. Elle saisit au passage un récipient sur l'une des étagères; il portait une étiquette, «CONFITURE D'ORANGES», mais, à sa grande déception, il était vide; elle répugnait à lâcher le<br />
récipient, de peur de tuer quelqu'un en dessous, aussi trouva-t-elle moyen de le fourrer dans l'un des placards qui jalonnaient sa chute.<br />
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«Ça alors, se dit Alice, après une chute pareille, je me soucierai comme d'une guigne de tomber du haut en bas de l'escalier! Ce qu'ils vont me trouver courageuse, à la maison! Ma parole,<br />
je n'en piperais pas un mot, même si je dégringolais du toit!» (Anticipation fortement vraisemblable, en effet.)<br />
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Elle chutait, elle chutait toujours. Cette chute ne prendrait-elle jamais, jamais fin? «Ça fait combien de kilomètres, maintenant, je me demande, dit-elle à voix haute. Je dois atteindre<br />
les parages du centre de la terre. Voyons: ça devrait faire six mille kilomètres de plongée, je crois.» (Car, voyez-vous, Alice avait appris diverses choses de la sorte au cours de ses<br />
leçons en classe, et bien que l'occasion ne fût pas des meilleures pour faire parade de ses connaissances, vu qu'il n'y avait personne pour l'écouter, malgré tout les passer en revue est un<br />
bon exercice.) «Oui, c'est à peu près la distance exacte... mais alors, à quelle Latitude ou Longitude je suis arrivée, je me demande?» (Quant à savoir ce qu'était la Latitude, ou<br />
d'ailleurs la Longitude, Alice n'en avait pas la moindre idée, mais elle trouvait que c'étaient là de beaux mots grandioses à employer.)<br />
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Bientôt, elle remit ça. «Est-ce que je vais traverser la terre de part en part, je me demande! Comme ça va faire drôle, de se retrouver parmi les gens qui marchent la tête en bas! Les<br />
antipathies, je crois...» (pour le coup, elle fut bien contente qu'il n'y eût effectivement personne pour l'écouter, car ça n'avait pas l'air du tout d'être le mot juste) «...mais il va me<br />
falloir leur demander le nom du pays, eh oui. Pardon, madame, sommes-nous en Nouvelle-Zélande? Ou en Australie? (et elle essaya d'assortir sa question d'une révérence - vous voyez ça, une<br />
révérence pendant que vous tombez dans le vide! A votre avis, vous y arriveriez?) «Et quelle petite ignorante je serais, à ses yeux! Non, ça n'ira pas du tout, de demander; peut-être que je<br />
verrai le nom inscrit quelque part.»<br />
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Elle chutait, elle chutait toujours. Il n'y avait rien d'autre à faire, alors Alice se remit bientôt à parler. «Dinah va beaucoup regretter mon absence, ce soir, j'en suis sûre! (Dinah,<br />
c'était la chatte.) J'espère qu'ils penseront à sa soucoupe de lait, à l'heure du goûter. Dinah, ma chérie! Si seulement tu pouvais être ici avec moi! Il n'y a pas de souris dans les airs,<br />
j'en ai bien peur, mais tu pourrais attraper une chauve-souris, ça ressemble beaucoup à une souris, ça, tu sais. Mais les raminagrobis mangent-ils les chauves-souris, je me demande.» A ce<br />
moment, Alice, prise d'une sorte de torpeur, se mit à répéter à mi-voix, sur un mode proche du songe: «Les raminagrobis mangent-ils les chauves-souris?» et parfois: «Les chauves-souris<br />
mangent-elles les ramina- grobis?» car, voyez-vous, puisqu'elle n'avait pas de réponse ni pour l'une ni pour l'autre question, peu importait, en somme, l'ordre des termes. Elle sentit<br />
l'assoupissement la gagner, et venait à peine d'entrer dans un rêve où elle marchait la main dans la main avec Dinah, et lui demandait du ton le plus sérieux: «Allons, Dinah, dis-moi la<br />
vérité: as-tu jamais mangé une chauve-souris?» quand, soudain, boum! boum! atterrissage sur un tas de brindilles et de feuilles mortes, et fin de la chute.<br />
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Indemne de toute contusion, Alice fut sur pied tout aussitôt: elle leva les yeux, mais il faisait tout noir au-dessus de sa tête: devant elle s'ouvrait un autre long couloir, que dévalait<br />
le Lapin Blanc, encore en vue. Il n'y avait pas une minute à perdre: comme le vent s'élança Alice; elle arriva juste à temps pour l'entendre dire, tandis qu'il disparaissait dans un<br />
tournant: «Par mes oreilles et mes moustaches, comme il se fait tard!» Elle était sur ses talons quand elle prit ce même tournant, mais le Lapin avait alors disparu à la vue: elle se<br />
trouvait dans une longue salle basse éclairée par un alignement de lampes suspendues au plafond.<br />
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Il y avait des portes tout autour de la salle, mais toutes verrouillées; et quand Alice l'eut parcourue de haut en bas et de bas en haut, en essayant porte après porte, elle s'en fut<br />
tristement vers le milieu, en se demandant comment, mais comment, elle en ressortirait jamais.<br />
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Soudain, elle tomba par hasard sur une petite table à trois pieds, tout en verre massif: il n'y avait rien dessus, à l'exception d'une minuscule clef d'or; première idée d'Alice: elle<br />
appartenait peut-être à l'une des portes de la salle; mais, hélas! de deux choses l'une: ou bien les serrures étaient trop béantes, ou la clef trop petite, toujours est-il qu'il n'y eut pas<br />
moyen d'ouvrir une seule porte. Cependant, entreprenant une deuxième tournée, Alice tomba sur une portière qu'elle n'avait pas encore remarquée; et derrière, une petite porte de quarante<br />
centimètres environ; elle essaya d'introduire la petite clef d'or dans la serrure, et à sa grande joie, elle s'ajustait!<br />
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Alice ouvrit la porte, pour découvrir qu'elle communiquait avec un petit couloir, guère plus grand qu'un trou à rat; elle s'agenouilla et ses regards plongèrent, au bout du couloir, dans un<br />
inimaginablement ravissant jardin. Quel désir de sortir de cette sombre salle et d'aller flâner parmi ces plates-bandes de fleurs aux couleurs éclatantes et ces fraî<br />
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Patrick<br />
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Je puise mes sources au fond du puits.<br />
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Derrière la petite porte un miroir qu'il faut traverser.<br />
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Peu de lecteurs mais les meilleurs comme toujours.<br />
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Alicement vôtre<br />
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