Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
23 Décembre 2010
Constat d'échec.
La vie d'une équipe sportive est ainsi faite d'arrivées et de départs, de blessures et d'arrêts définitifs. Le plus souvent, tout se décide lorsque la saison se termine. Les sollicitations, les bilans, les évidences apparaissent et deviennent réalité. Chacun le sait et vit alors la décision du coéquipier avec une relative fatalité.
Dans quelques jours, Paul ne sera plus des nôtres. Au milieu du guet, le grand a choisi de rebrousser chemin, de revenir près de chez lui, là où il avait commencé son histoire ovale. Il n'est pas question de le montrer du doigt, sa décision est somme toute assez logique du point de vue pratique et le coût carbone de son loisir Rugby va en être singulièrement réduit !
Il y a dans ce départ en catimini quelque chose qui me gène et qui m'interpelle. Paul s'en va sur la pointe des crampons, sans se retourner ni dire au-revoir à ceux qui hier encore étaient ses coéquipiers. Un petit message malhabile sur un répondeur en guise de salutations déplorées, je devine alors que la brisure est profonde ….
Trop de défaites qui s'accumulent, trop d'exigences sans doute à l'entraînement, trop de pression pour celui qui ne veut plus se donner la peine de poursuivre son rêve d'Honneur. Il jette l'éponge, il abandonne à mi-parcours pour ne pas avoir à assumer un échec qu'il ne veut pas vivre.
Je prends à mon compte cette décision particulièrement significative de la lassitude de tous les autres. La vie ne prépare plus à se confronter à cette accumulation de contrariétés. Seul le sport permet encore de se forger un caractère dans la difficulté. Mais il faut être d'acier trempé pour tenir le cap quand le bateau tangue à chaque rencontre.
Dans le passé, j'ai connu des groupes qui se sont construits dans des défaites à répétitions jusqu'à ce qu'un ciment puissant ait soudé les joueurs pour renverser la vapeur et retrouver le bonheur de la victoire. Les Pauvres misères furent de ceux-là, les Vierzonnais aussi doivent se souvenir de ces matches galères qui préparèrent des lendemains victorieux.
Paul n'a pas eu la patience, n'a pas voulu courber l'échine, n'a pas cru à ce merveilleux possible. Il a choisi de tourner les talons, de partir sans se retourner et de briser le cœur de ses anciens camarades. Demain nous parlerons de lui au passé, c'est hélas ainsi que va la vie d'une association. Le respect de l'engagement annuel n'est plus de mise et Paul n'est pas le seul qui ne termine pas la saison.
Tournons nous vers l'avenir radieux. En janvier, un nouveau championnat commencera, nous mettrons les compteurs à zéro, nous ne penserons plus qu'à relever la tête et nous le ferons sans Paul mais avec le retour d'Éric, leader charismatique de ce groupe et l'arrivée miraculeuse de Mickaël que nous prendrons garde de ne pas voir comme un messie.
Je souhaite bonne chance à Paul, j'eus préféré un départ plus élégant, une discussion franche et loyale de vive voix. Il a choisi le téléphone, je ne doute pas que ce soit la forme préférée de cette génération. Je lui retourne ma façon, un peu plus protocolaire, gravée dans le marbre de la toile. Chacun sa façon mon garçon !
Le mercredi 5 janvier, nous reprendrons le chemin des vestiaires. Une place sera vide, deux nouvelles seront prises. Il n'y a pas de bilan positif dans cette arithmétique humaine. Ce départ restera à jamais un renoncement et j'en suis parfaitement affecté.
Franchement sien.