Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
19 Mai 2010
Cette petite poudre blanche …
Des jeux et du pain. Pour les jeux, nous sommes de plus en plus gâtés, les chaînes s'arrachent les grands événements, diffusent de façon continue ce qu'on nous vend comme étant
un spectacle incroyable, exceptionnel, unique, phénoménal... Pour le pain, c'est beaucoup plus compliqué. Je pense que nous avons mangé notre pain blanc et que le plus dur reste à venir !
Les superlatifs sont en vente libre dans les magasins de sport et les écoles de journalistes éponymes. Il faut s'enthousiasmer même lorsque le spectacle est misérable,
indigeste et ennuyeux à souhait. Les contempteurs de la geste en mouvement jouent de la voix, de l'éclat, du cri, du hurlement. Toute la gamme hystérique permet d'habiller ce qui est parfaitement
dépouillé.
Pour donner l'impression de solliciter parfois le cerveau du supporter, un consultant consulte ses fiches, ses statistiques en direct, ses anecdotes exclusives, ses potins
crottins. On se gausse, on discute entre-soi pour faire durer. La parole doit tenir toute la distance …
L'exploit est redoutable quand le sport en question est interminable. Gloire aux conteurs du cyclisme, aux palabreurs du tennis, aux papoteurs du golf, aux discoureurs de
toutes ces activités humaines qui ne se montrent le plus souvent qu'au masculin particulier.
Le sport devrait rester à sa place. C'est une activité humaine fort agréable certes, mais qui ne devrait en rien interférer avec les problèmes du moment, les difficultés de nos
nations, les nécessaires réflexions que nous devrions mener pour améliorer les existences de tant d'habitants de cette planète.
Au lieu de quoi, il prend la première place. S'impose sur les plateaux des journaux télévisés. Occupe la Une de notre presse écrite. Se glisse dans le spectacle politique avec
des réceptions et des décorations scandaleuses. Il boute de l'avant-scène les vrais problèmes du moment, il parasite les esprits fragiles qui ne pensent plus qu'à ça !
La prochaine Coupe du Mode de football arrive à point nommé pour glisser dans le brouhaha de la chose, le vacarme de ce monde rond, le grotesque de ce délire collectif, les
dossiers brûlants qui risqueraient de faire battre en retraite notre bon gouvernement.
En haut-lieu, on se frotte les mains, on affûte les couteaux, on peaufine les coups-bas à nos acquis sociaux. Le ballon rond fera avaler les pilules. Pourvu que l'équipe de
France passe le premier tour, les gens seront heureux et aveugles à tout le reste.
Quelle période sublime ! Quel monde merveilleux qui offre chaque année plus de rendez-vous essentiels qui sont les plus beaux anesthésiants sociaux qui soient. Mais là, c'est
le pompon qui pointe le bout de son chapeau de clown ! Plus personne ne pensera à autre chose, le FOOTBALL du matin au soir, du soir au matin et dans les rêves des plus aventureux.
Un super-marché parie sur l'infortune des hommes de Raymond la prescience pour vendre des télévisions grand écran. Les gus-gus vont se précipiter, carte de crédit en main, pour
s'offrir un miroir aux alouettes. Ils seront remboursés si leurs idoles gagnent. Ils en sont convaincus et comme les paris sportifs sont maintenant autorisés, pourquoi se gêner et plumer
les pigeons entre filous et gouvernants.
L'opium du Peuple, une poudre aux yeux qui ne fait aucun effet bénéfique à ceux qui se shootent dans des buts vides de sens. J'aime le sport, mais pardonnez-moi cette réflexion
insensée ; je l'aime lorsqu'il reste à sa juste place d'activité de loisir.
Planétairement vôtre