Mon programme Johannique.

Un chemin de choix, de joie et de foi.

    La grandeur exige le rituel et la commémoration. Il n'est rien d'important qui ne subisse ce nécessaire embaumement.  Jeanne la Lorraine aux belles joues de bergère, plus que tout autre, mérite à jamais la reconnaissance de sa bonne ville de Cenabum.

    Dans un louable souci prosélyte, j'ai décidé de vous narrer par l'autre bout de la lorgnette, le programme des festivités de l'éternel recommencé, du divin remercié et de la pucelle honorée.

    Tout débute par des préliminaires dès le jeudi 29 avril. Plus ils sont longs, moins la jeune pucelle sera effarouchée. Elle pénètre en Orléans par la porte Bourgogne. La chose n'est pas banale, c'est au son des cornemuses qu'elle entre, déjà auréolée par son onction divine en affirmant de façon surprenante : « J'aurais préféré le son aigrelet de nos petites flûtes pastorales ! ».

    Puis, des artificiers musiciens lui offriront un spectacle au titre étrange : « Siège et mystère; » Ceux-là pensent comme beaucoup d'hérétiques du dogme Johannique, que dame Jeanne des Armoises, après Rouen fut une parturiente, mal commode qui souffrit fort de ses couches. Mais laissons-là ces médisances impies et poursuivons notre programme.

    Le samedi 1er mai, pour éviter des défilés trop revendicatifs, la bonne ville organise une chevauchée de Jeanne dans sa ville. Pour ajouter à la confusion, Charlemagne sera de la fête avec joutes et pitreries médiévales en son île. Plus de six cents années d'erreur et une traversée de la Loire au moteur, une bonne fête historique est anachronique ou n'est pas !

    Monsieur l'évêque piaffait d'impatience. Il se demandait quand il aurait le droit de célébrer celle qu'un de ses confrères a vouée aux flammes de l'enfer et des Anglois. Il priera pour ses cendres le dimanche 2 mai en l'église des miracles après une bonne procession à l'ancienne.

    Le spirituel étant passé par là, le repos du clerc met le laïc au turbin. Pendant quelques jours, les affaires courantes de la cité reprennent leurs droits. Il faudra patienter jusqu'au jeudi 6 mai pour reparler de notre donzelle. Un café littéraire, boisson totalement inconnue à l'époque, preuve que les lettrés ne sont pas non plus à une approximation près.

    Dès le lendemain, les adorateurs de l'héroïne seront sur les charbons ardents pour les trois jours suivants. C'est un mimétisme qui les honore et qui prouve que la flamme de la bergère brûle toujours et pour longtemps encore dans de nombreux cœurs ligériens.

    Le vendredi le programme est copieux, disparate à souhait ! La jeune méritante catholique qui ouvrira le cortège se voit remettre son étendard. L'esprit guêpin perturbe en Orléanais ….
Le marché médiéval ouvre sa foire au factice, à la confusion et à l'indigestion. Du tout et du n'importe quoi, de l'authentique toc et du véritable minable. L'habit ne contente pas plus le moine que l'historien. La cathédrale s'enflamme tout comme la jeunesse locale qui a droit à un Set techno pour signifier la modernité du message de notre Lorraine.

    Le samedi 8 mai, c'est le jour de gloire et de délivrance. La moitié de la ville regardera David Douillet assurer la sécurité de la jeune fille pure juchée sur un cheval. La vidéo surveillance ne suffit plus, un garde du corps personnel est attribué à la damoiselle. L'alliance du Kimono et de l'armure avec les provinces, l'armée, le clergé, les corps constitués et tout le tintouin pour transformer un long pensum en une grande fête populaire. L'évêque et son collègue de Nanterre ne resteront ni en reste ni en messe. Tout ce petit monde aura droit à son grand office solennel pour célébrer la séparation de l'église et de l'état, la sainte et la France éternelle.

    Les ripailles médiévales se poursuivront jusqu'au lendemain, pour rappeler à tous la difficulté terrible de vivre en état de siège. Si vous manquez la chose cette année, ne vous mettez pas Martel en tête, l'année prochaine sera copie conforme.

    Johanniquement vôtre.