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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Gérard Filoche et les femmes au travail !


We want sex equality

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Il y avait la foule des militants et surtout des militantes blanchies sous le harnais des luttes qui autrefois, faisaient parfois bouger les choses. Les temps sont durs pour la cause des travailleurs, les régressions sont multiples, les coups portés aux travailleuses plus terribles encore que pour les hommes. Dans ce contexte, la projection du film : « We Want sex equality » était une bouffée de nostalgie, de ce lointain temps où un juste combat pouvait aboutir à une mesure nécessaire.

Gérard Filoche était le meneur des débats qui suivirent une projection chaleureusement applaudie par le public.. Homme passionné et passionnant, il apporta son expérience d'inspecteur du travail, de militant et de politique. Il y avait manifestement de la conviction, de la détermination, une énergie communicative chez ce fort beau manieur de mots, ce tribun éclairé.

Le film relate la lutte d'un atelier de femmes, petites mains chez Ford qui cousaient dans le mépris général les sièges des modèles rutilants de la société. Dans des conditions difficiles, ces femmes sont sous-payées, leur qualification n'est pas reconnue. Nous sommes en 1968, ces 187 femmes vont faire plier l'immense société Ford, obtenir gain de cause et la reconnaissance de l'égalité des salaires entre hommes et femmes grâce aussi à une Barbara Castle, ministre à l'écoute.

Il est bien étrange de regarder un film qui raconte l'obtention d'un principe qui n'est toujours pas appliqué dans notre pays plus de quarante ans plus tard. Les interventions de Gérard Filoche sont à ce titre très éclairantes. Les lois existent pour démontrer la bonne volonté du pouvoir mais rien n'est mis en place pour qu'elles soient appliquées. La volonté est claire, maintenir les inégalités, favoriser la réduction des droits, supprimer les avancées anciennes des droits du travail.

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Voter un principe sans mettre en place des mesures répressives contre ceux qui les enfreignent c'est se faire objectivement leurs complices. Les pouvoirs s'entendent dans cette démarche et aiment à jeter de la poudre aux yeux à un électorat bien naïf. Petit à petit, la lente dégradation de la protection des travailleurs installe dans notre pays les conditions favorables à plus de précarité, plus d'inégalité, moins de protection et de lutte. Terrible constat qui atteste des dégâts de dix années de droite dure.

Le débat peut commencer. Les femmes sont en immense majorité dans cette grande salle du cinéma des Carmes. Les quatre premières interventions sont le fait de dames en colère, de femmes justement indignées du sort qui leur est réservé dans le monde du travail. Elles exposent leur désarroi, elles restent fidèles au thème du film et du débat. Gérard Filoche éclaire leurs propos du poids de ses expériences de terrain.

Puis, les hommes interviennent et réclament leur part de micro. C'est étrange, les interventions traînent en longueur, leur fil est impossible à suivre. Ils se posent d'abord en référence à leur chapelle ; syndicales pour la plupart. J'ai du mal à comprendre le sens exact de leurs logorrhées.

D'autres femmes réussissent à couper ce flot de paroles. Leurs interventions sont brèves et pertinentes. Elles ne s'écartent pas du thème. Elles portent les douleurs d'un drame qu'il est facile d'observer autour de soi, des conditions qui se dégradent jour après jour, des emplois précaires, des atteintes aux droits de la travailleuse mère, le temps partiel subi, la sous-qualification et les salaires de misère. La femme est aux premières loges de la crise !

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Puis un homme se lève. Il évoque Duras, se lance dans un discours dithyrambique. Il n'a pas toute sa tête, se montre agressif et dit des horreurs. Il porte un chapeau, belle marque de respect pour ses voisins de derrière lors de la projection. Désir pathétique de se faire remarquer. L'ustensile n'est pas nécessaire, il se démarque si facilement !

Il terminera en apothéose par une sortie d'une rare stupidité. Il hurle à Gérard Filoche : «  Est-ce que vous avez été enceinte pour venir ainsi parler à leur place ! ». Pantin dérisoire, il quitte les lieux accompagnés de son chapeau et de tous ses excès. La montagne a accouché d'une souris !`

Puis le débat se poursuit. J'écris débat mais je n'ai pas l'impression qu'il y avait vraiment échange d'arguments. Chacun vient porteur de son étiquette qu'il faut mettre en avant. On parle de sa place, on avance ses couleurs ou sa prochaine candidature. On s'écoute un peu, se répond rarement. Seul Gérard Filoche tente de maintenir un peu de cohérence à ce méli-mélo de l'indignation légitime. Trop de douleurs, trop d'injustices pour les dire sereinement.

J'aurai aimé intervenir pour rebondir sur le film, ce que j'avais cru en comprendre. Mais le déséquilibre dans le temps de parole des hommes par rapport aux femmes était tel que mon silence s'imposait. Pourtant cette belle histoire révèle bien des points significatifs. La lutte légitime d'un petit groupe de femmes qui sont d'abord en butte avec l'appareil syndical totalement masculin. L'attitude odieuse et inhumaine d'un patron déjà prompt à jouer le chantage et la manipulation.

Et puis surtout le film met en lumière la force des mots simples, des mots qui viennent du cœur et sortent des tripes. Un discours peut tout changer, une intervention qui sort des mots attendus des slogans ou des truismes habituels. Une intervention qui est à la frontière du pathos, qui tire les larmes. Nous sommes bien loin du verbiage militant de quelques intervenants ou du manque d'émotion dans le discours de la prochaine candidate.

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Ils montrent aussi que le drame des femmes c'est d'abord le sort qui se joue pour elles dans la cellule du couple. La grande bourgeoise, femme d'une immense culture est considérée comme une potiche par un mari cadre supérieur. Si nos ouvrières sortent gagnantes de leur bras de fer, elle, est réduite au silence par ce plafond de verre qui reste la principale raison de cette inégalité qui n'est pas prête de changer. Groupées, les femmes peuvent obtenir quelques succès mais l'essentiel se joue encore partout où les hommes maintiennent une hégémonie de fait : Gouvernement, parlement, conseil d'établissement, toutes les hiérarchies de ce pays, foyer.


C'est une véritable révolution des consciences qui doit encore être menée. Je crois même que la cause des femmes a reculé depuis quelques temps et l'absence de jeunes femmes dans la salle n'est pas de nature à me réconforter pour l'avenir. Je quittai les lieux un peu désemparé par ce que je venais de voir et surtout d'entendre. Il y a du pain sur la planche !


Féministement leur.



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M
<br /> Tant qu'il y aura des femmes... et heureuses de l'être... Aussi.<br /> <br /> <br /> Je vais te faire hurler, mais parfois je me dis qu'une femme se sent parfois "moins" si elle se place sur l'échelle "masculine" des valeurs : salaire, pouvoir... Sur l'échelle que j'appelle<br /> "humaine" (sensibilité à la beauté, propension à l'ouverture -accueil et générosité-), je pense que souvent, le masculin s'étrique (sans jeu de mots, quoique...); Je t'embrasse, très fémininement<br /> !<br />
Répondre
B
<br /> <br /> MJO<br /> <br /> <br /> Je ne suis pas par l'égalité en toute chose mais pour une complémentarité réelle dans des droits égaux. Il faut admettre que tu souhaite me conduire sur un terrain mouvant, ne serait-ce pas un<br /> sable de Loire ?<br /> <br /> <br /> <br />