5 Juillet 2010
Jambes lourdes
La nuit fut courte, l'impatience a dominé la nécessité de dormir convenablement. J'ai tourné comme un diable en cage jusqu'à ce que le réveil indique une heure décente pour songer à bouger. Cinq heures, le pèlerin se lève et met en ligne le billet du départ.
Six heures, les premiers pas dans une ville déserte qui sommeille encore. Bien vite le poids du sac impose son extravagance insupportable. Il faudra tenir … La cadence est celle d'un inconscient frais émoulu de l'école. J'ai hâte de sortir de la ville !
Six heures 30, me voilà déjà au Sud ( de la Loire seulement). Le soleil se lève sur le fleuve royal, le plus beau moment de la journée réservé à ceux qui se lèvent tôt ou veulent aller loin. Je regarde mon petit podomètre acheté chez monsieur Décathlon. Il m'indique l'heure, je lui en sais gré et affiche une distance de 500 mètres. Je déplore cette sous évaluation manifeste.
J'avance maintenant sur une piste cyclable. Les sorties de ville ont enfin offert aux cyclistes des possibilités de fuite. Le piéton n'est toujours pas à la fête et mange de l'asphalte si brûlant sous la semelle. Je regretterai plus tard cette accumulation de bitume …
Je croise mes premiers humains, cyclistes pressés qui s'en vont au travail. La conscience écologique est en marche et l'homme responsable est en selle ! Je sors de la ville avec une petite pensée émue malgré tout pour ce stade qui ne me fut pas propice.
Un petit pont m'ouvre enfin les portes de la campagne. Un champ de blé et au loin mes premiers arbres. Il me tarde d'être à l'ombre de ces feuillus majestueux. Le soleil se fait chaud, la sueur dégouline partout où elle peut se frayer un chemin J'évacue les toxines de soirées déraisonnables à fêter au champagne l'arrivée des vacances.
C'est dans les bois de Saint Cyr que je fais ma première pose. La fatigue aidant je rêve d'une elfe lutine, d'un peu de fraîcheur et d'une caverne magique. La marche constitue-t-elle un dangereux psychotrope ? Il me faudra être prudent et en user avec modération.
Le rêve s'évanouit comme il était venu, je poursuis le chemin dans le bois en me guidant au soleil. La méthode a ses limites et je m'en aperçois bien vite. L'usine que j'ai longée ressurgit dans mon dos. Il ne faut pas tourner en rond quand on se fait bourrique trop chargée !
Je coupe à travers bois pour m'orienter plein sud. Je décide de laisser le chemin fléché pour un sous-bois qui m'attire davantage. Quelques ornières plus loin, un auto apparaît, le gentil conducteur m'avertit immédiatement que je ne suis pas sur le chemin communal.
Le miracle de la méta-communication une nouvelle fois agit à merveille. Je comprends à demi-mot que mon passage n'est pas apprécié. Je joue les naïfs pour lui demander ma route. Le propriétaire, au demeurant aimable, m'indique la route la plus proche qui me permettra de déguerpir au plus vite.
Après quelques minutes, le même repasse sur ma route, satisfait sans doute de ma docilité. Pour mon malheur, ce sont quatre longs kilomètres d'asphalte rugueux qui se présentent à moi. La route départementale ne plairait pas à Jean Yanne, je partage cette fois l'aversion du bonhomme. Les voitures filent à bien trop vive allure. La maréchaussée et les contrôles automatiques ne doivent pas sévir en ce lieu.
Au bout de ce trop long ruban, les pieds me chauffent et j'aperçois, soulagé, le panneau Marcilly en Villette. C'est au ventre jaune que je dépose le sac, retire les chaussures et rédige ce billet. Il est 11 h 30, je vais pouvoir flâner.
Solognement vôtre