Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
17 Mars 2010
ou : Le brouhaha des politiques.
Les prévisionnistes l'avaient redouté, le petit peuple des pêcheurs à la ligne, des désespérés de la vie quotidienne, des exaspérés de la duperie permanente l'a
fait ! Cinquante trois pour cent de nos concitoyens (si ce vocable a encore un sens …) ont oublié que voter est un droit extraordinaire et non un devoir insupportable. Il a été obtenu de haute
lutte par de glorieux ainés qui l'ont parfois payé de leur vie. Il est envié dans des nations privées de cette liberté qu'on méprise …
Ce silence assourdissant de nos urnes régionales n'a pas pour autant laissé sans voix ceux qui en furent si cruellement privés. Nos sublimes bateleurs intarissables
sont venus parader encore une fois sur les plateaux télévisuels, des formules préfabriquées en poche. Ces professionnels du
bulletin de vote ou de son analyse se sont réunis pour, dans une confondante fraternité, pérorer encore et toujours sur les résultats de ce désastre collectif.
Et là, stupeur, après les quelques formules d'usage pour regretter ce désamour, cette faiblesse de la mobilisation, cette absence de clarté du scrutin, ce désintérêt de la politique régionale, ce
manque d'enjeu, … , ils se sont remis à pratiquer leur sport favori : la polémique politicienne !
Les uns se félicitent, les autres trouvent des raisons d'espérer. Les premiers crient déjà victoire, les seconds passent à un sursaut républicain. Les mieux lotis
font les comptes de tous leurs possibles, les plus chafouins investissent sur les absents.
Pendant ce temps, des comparses d'hier accèdent à des rôles moins subalternes alors que d'autres sont rayés de l'histoire du jour. Les figurants de toujours gonflent le torse et veulent se faire
entendre. Les vedettes du quoi qu'il arrive finissent par parler à leur place, comme ils le font systématiquement avec nous d'ailleurs !
Chacun se rengorge de pourcentages fictifs. Les lois de la mathématique statisticienne donnent une grosse part aux meilleurs quand les quantités ont diminué. Il faudrait évoquer le nombre réel de
voix obtenues, constater le reflux inquiétant de l'esprit civique, la décrue des soutiens portés vers les deux grands partis. Au mieux, cette opposition arrogante gouvernera 22 régions avec
l'approbation seulement d'un huitième du corps électoral et ce parti méprisant d'un président sourd gérera encore la France
avec la même representativité.
Les ténors de la chose publique et leurs amis les journalistes vedettes s'entendent pourtant comme larrons en foire pour couper la parole à qui veut dire quelque chose, s'approprier des mérites
qui expliquent le succès d'une sensibilité qui pointe le bout de son nez, accuser l'autre d'avoir favorisé le succès de ceux qu'on méprise de concert.
Le ministre de l'environnement affirme que la
victoire de l'écologie c'est à lui qu'on la doit. Le chef de file de la majorité attaque ses meilleurs ennemis sans aucun regard introspectif. Un ancien premier ministre de gauche parle de gain de la
première mi-temps, il se fiche de savoir si les gradins sont vides.
Ils se coupent la parole; sont inaudibles, passent leur temps à affirmer outrés : « Je ne vous ai pas interrompu ! ». Ils parlent, parlent à nous saouler, parlent pour
oublier cette réalité quotidienne qui est évacuée de leurs propos. On évoque les alliances à réaliser pour emporter la bataille, on se moque des accords de circonstances, des mésalliances, des
mauvaises intentions de son voisin.
Ils se déchirent, se traitent de menteur, couvrent les propos du voisin et ils voudraient que ceux qui n'ont pas coupé ce spectacle pitoyable aient envie de se rendre aux urnes pour eux. Les
pauvres, s'ils se voyaient ! J'irai voter pour exercer cet honneur républicain mais j'attends autre chose pour porter ma voix à des idées nouvelles et non à des pantins obséquieux.
Audessusdelamêlement votre