Les derniers queux à la française.
Trouver un bon petit restaurant à la Française est devenu une tâche insurmontable dans ce pays, jadis si fier de sa tradition culinaire. Les nourrisseurs de toutes obédiences
tiennent le haut du pavé et sont si nombreux qu'on finit par ne voir qu'eux.
Les gens se satisfont maintenant d'un nourrissage expéditif, médiocre et sans personnalité. Le mou, le fade, le sucré ou le trop épicé dominent cet impérialisme culinaire qui
efface les particularités, gomme les originalités et nie les spécificités. La pizzeria semble être la seule réponse plausible à l'infâme restauration rapide et insipide.
Le Kebab blanchit des fonds stupéfiants et s'impose comme un incontournable de notre alimentation pressée par un rythme de vie insensé. L'asiatique sème la graine de
l'orientalisme avec les mêmes qualités de vitesse, de souplesse et mollesse que ses rivaux exotiques. Les restaurants de nos grandes villes sont les partenaires alimentaires des agences de
voyage.
On y vend du rêve et de l'illusion à bon marché. On se retrouve dans un ersatz d'étrangeté géographique. Le faux-semblant est la règle, tout comme pour ces voyages où finalement
on ne quitte pas un hôtel luxueux, réplique illusoire, factice, protégée, artificielle du pays réel.
Alors, quand l'occasion vous transforme vraiment en Larron en foire jubilatoire, il ne faut pas hésiter à faire savoir la grande et succulente nouvelle. Il existe encore
des îlots de résistance, des espaces simples et accessibles où des artisans cuisiniers partagent ce bonheur simple et si rare de la bonne table sans ostentation ni addition indigeste.
Le Petit Bouchon à Gien dans le Loiret est de ceux-là. Dans la faïence locale, le plaisir des yeux se dispute avec le bonheur des papilles sans épuiser un porte-monnaie contrarié
par la réalité économique. On s'y restaure tout simplement, sans attendre des heures un service se transformant en un concours de grimaces obséquieuses.
La patronne offre à ses clients une importance discrète. Elle ne les oublie pas, elle ne s'impose pas derrière leur dos. La nuance est maîtresse en toute chose en ce petit
lieu qui a la délicatesse de ne point vous imposer une musique sirupeuse ou une télévision superfétatoire quand on communique encore avec ses semblables.
Le patron trône dans sa cuisine, il y fait tout, sans tricher avec des micros-ondes indignes, des sauces en poudre, des plats venus d'ailleurs. Il fait son métier, celui qui
devrait être compris dans l'appellation « Restaurant » qui mériterait une législation plus rigoureuse.
Il cuisine et ne rechigne pas à donner un coup de main en salle où à fournir quelques explications à des gueules qui se veulent fines mais sont incapables de distinguer une
graine de sésame d'un fragment d'arachide. Il a conçu une carte simple qui se décline en trois formules permettant de satisfaire tous les appétits.
Les vins de Poupat accompagnent parfaitement la fête locale, il n'est pas besoin d'aller quérir ailleurs ce que le terroir est capable de vous offrir avec la simplicité qui
sied aux gens de ce pays. Les mauvaises langues prétendront ce que je m'exalte parce que le repas nous fut offert par nos amis Florence et Pascal. Quelle bassesse de me juger ainsi !
Consultez les internautes, ils évoquent eux aussi l'authenticité, la simplicité, la finesse, leurs papilles ravies et l'inventivité d'une cuisine raffinée. Alors n'hésitez pas et
poussez ce petit bouchon plus loin encore en réservant, précaution indispensable si vous ne voulez pas vous retrouver le bec dans la Loire … !
Gastronomiquement vôtre.