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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Le chat perché

Les tréteaux au pays des chiens.

 

 

Une jeune compagnie théâtrale, après dix ans en région parisienne, est venue poser ses valises en Orléans depuis un an, pour trouver un nouvel espace d'expression. Ils ont répété dans la salle Olympe de Gouges un spectacle éponyme, écrit, monté et joué par ces nouveaux aventuriers de la scène vivante. Un spectacle auquel j'ai assisté en la Maison des Arts et de la Musique, une salle dédiée à la création et à l'expression locale, sans la volonté d'y installer une scène qui nécessite trop de main d'œuvre.

Le chat perché à ras du sol, j'y vois une forme de symbole pour une politique locale de la culture qui semble mettre tous ses œufs dans le même panier CO'met. La sobriété pour les autres, quand l'immense salle dévorera tous les budgets et toutes les attentions. Je pense qu'il y a eu vraisemblablement une maladresse dans le choix du patronyme de cet équipement qu'il eut été plus judicieux de qualifier de trou noir.

Mais revenons à nos chats non perchés. Ce n'est pas la première fois que je constate que l'absence de scène dans cette salle, provoque un curieux effet pour le spectateur, une forme de nivellement qui ne sert ni les artistes ni même le public. Si nos jeunes acteurs surent sans trop de mal se sortir de ce piège terre-à-terre, il n'en fut pas de même en d'autres occasions.

La scène est un podium, un promontoire qui depuis les tréteaux de Molière et de la Comédia d'El Arte, élève l'artiste, lui confère une forme de majesté, d'importance par laquelle il transcende son jeu. Nous sommes loin des amphithéâtre grecs et romains qui en eux-même, par leur architecture, facilitait cette distanciation au réel que favorise l'estrade.

Rabaisser ainsi les artistes locaux, les chorales, les jeunes troupes pour faire des économies, c'est bien un signe de dédain pour ce qui ne vient pas des étoiles lointaines à qui l'on déroulera le tapis rouge des grandes salles et de cette faramineuse Aréna. Le chat est maigre quand il joue au ras du sol et l'estrade est tombée sur le chien qui assiste à la représentation.

La magie de la théâtralité passe par la scène, le rideau, le décor, les gradins pour le public. Il y a là les ingrédients incontournables d'une mise en abîme du spectacle, d'une échappée du réel pour entrer dans un autre monde. On mesure bien qu'il manque quelque chose quand, dans les villages qui ne disposent que de salles polyvalentes, tous les spectateurs se situent au même niveau sur des chaises. Les organisateurs font alors avec les moyens du bord et il n'est pas question de leur jeter la pierre.

Mais ici, c'est bien une volonté de ne pas considérer cette Maison des Arts et de la Musique comme une véritable salle de spectacle que de ne plus installer l'élément clef de scénographie. Mais qui donc sera de taille à se dresser contre cette incongruité dans une cité où élever la voix contre l'échevin s'est se mettre au ban dans l'instant. Pourtant je suis encore là pour monter sur mes grands chevaux, hausser le ton afin de faire le porte-voix sans langue de bois pour dénoncer ce manque de respect pour tous ceux qui ne peuvent en ce lieu monter sur les planches.

Pour redonner la langue à nos chats perchés dont le spectacle mérite indubitablement d'être mis en lumière et en hauteur, il est bon de rappeler à ceux qui nous gouvernent aujourd'hui que leur prédécesseurs avaient compris l'importance de cette élévation, non de l'esprit hélas, mais du spectacle puis que la bonne Olympe de Gouges monta sur l’échafaud pour y perdre la tête.

Le bourreau et ses commanditaires savaient qu'il convient pour un bon spectacle d'offrir un marche-pied puis un promontoire digne de ce nom pour la scène finale. Puisse notre bonne municipalité s'en souvenir afin qu'une scène puisse à nouveau accueillir les artistes à la Maison des Arts et de la Musique.

À contre-échelle.

 

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