Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
22 Février 2023
22 février 1943
Quand la jeunesse allemande se soulève.
Mon expérience radiophonique m'a conduit à une singulière expérience dont l'envie me prend de vous la narrer. J'ai reçu un message me demandant si je pouvais techniquement réaliser un interview téléphonique. Les moyens de fortune dont je dispose me permettant de répondre par l'affirmative, je reçus un dossier de presse et une bande annonce pour une pièce de théâtre se jouant actuellement à Paris : Jamais Plus de Geoffrey Lopez joué par Antoine Fichaux.
Restait alors à tirer le fil entre ce spectacle relatif à la seconde guerre mondiale et Ondes Bleues la web Radio dont les studios sont installés à Guérande et qui se spécialise dans ce qui touche à l'univers maritime d'une manière générale. Il me revenait surtout de me demander : « Ce qui me valait l'honneur de pareille requête ? » d'autant plus que je n'ai pas vu la pièce.
Pour la première interrogation, pas de souci, la tournée de la pièce la conduira le 12 mai au Pornichet. Voilà une raison suffisante pour inciter les auditeurs locaux à se rendre à ce spectacle d'autant que l'audience de notre station qui ne cesse de croire permettra un formidable éclairage à ce spectacle. Quant à ma désignation, pour flatteuse qu'elle soit elle m'incite à penser que mes productions poussent notre maître des ondes à croire que je suis à même de remplir cette mission. Il me reste donc à deviner ce qui lui mit cette idée en tête.
Je me suis alors attelé au dossier de presse pour découvrir que cette pièce traitait d'un épisode de la seconde guerre mondiale que j'avais déjà croisé par le truchement de deux romans qui m'avaient passionné : Seul dans Berlin de Hans Fallada et Les Cartes Postales de Anne Berest. Je n'étais donc pas dans un terrain inconnu tandis que les sujets que j'aborde plaident pour une sensibilité proche.
Durant le contact préalable à l'entretien qui sera enregistré, je précisais franchement le contexte auprès de Antoine Fichaux. Il était hors de question de lui laisser croire que j'avais vu la pièce ni même que je me comporterai en journaliste. Le bâton rompu sera la règle pour évoquer le parcours d'un acteur qui fut à l'origine de la création de cette pièce dont il a confié l'écriture à un camarade. Déjà, cette délégation de pouvoir interpelle l'écriveur compulsif et mérite des éclaircissements.
Puis, la bande annonce laisse entrevoir la métamorphose du personnage sous le joug d'un pouvoir impitoyable. Tout d'abord, l'endoctrinement de la jeunesse pousse le héros à se laisser prendre par ce terrifiant filet. Il adhère pleinement à l'idéologie de haine, se faisant lui-même acteur de cette horreur. L'uniforme, la propagande, l'unanimité d'une population qui ne pense pas avoir le choix confortent le jeune homme dans son abominable démarche.
Puis un jour, la prise de conscience survient au détour d'une action qui provoque le dégoût de soi-même. La vérité apparaît alors dans sa cruauté, son absurdité, sa férocité. Se faire le complice de ce qui devient désormais à ses yeux la pire abjection n'est plus tolérable. C'est alors la descente aux enfers, la révolte, le refus et son corollaire sous une dictature : la répression.
Ne voulant plus se faire complice, celui qui était dans les jeunesses hitlériennes devient le renégat, l'homme à abattre, la bête traquée tandis que dans une tentative suicidaire, il tente d'ouvrir les yeux des jeunes étudiants qui l'entourent. La référence devient alors le groupe de la Rose Blanche qui à partir de février 1942 a distribué des tracts antinazis dans l'université.
Leur combat ne durera pas très longtemps puisque très rapidement la répression tombera, froide et impitoyable pour aboutir le 22 février 1943, il y a tout juste 80 ans, à l'exécution des deux instigateurs : Hans et Sophie Scholl, le jour même de leur procès expéditif avant que d'autres tombent sous les balles de leurs bourreaux.
Éternelle histoire de ceux qui se dressent contre un pouvoir inique, il y a dans ce parcours une leçon pour les générations futures tout comme une référence recevable pour nos temps présents. La force d'un pouvoir, dictatorial ou hypothétiquement démocratique, qui détient tous les organes d'information permet toujours d'écraser les voix discordantes ou simplement de les ridiculiser.
Ayant pris soin d'envoyer ce texte au préalable à qui m'avait mandé, je découvris qu'il avait eu le bonheur d'assister à la pièce et qu'il me faisait pleinement confiance pour en rendre compte dans cette manière qui me caractérise. L'interrogation initiale tombait d'elle-même, je n'avais plus qu'à travailler le dossier, comme je le fais toujours.
C'est donc fort de ces réflexions que j'aborderai cet exercice périlleux. Je vous en rendrai compte en temps et en heure quand le moment sera venu. En attendant, en ce jour anniversaire, je vous invite à avoir une pensée pour ces martyrs allemands qui furent l'honneur de cette nation.
La pièce « Jamais Plus » se joue jusqu'au 26 mars au théâtre des variétés les jeudis – vendredis & samedis à 20 h et les dimanches à 17 h.
Interview de Antoine Fichaux
Jeudi 23 février 2023 à 11 h
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