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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

L'Amphitryon malgré lui.

Qui sonne dîne …

 

 

 

Il advint qu'un esthète tout autant un gourmet fine gueule, un homme de bonne chair et de grande appétence, se fit tant et tant d'amis qu'il en perdit la santé et la quiétude. Il est vrai qu'il avait une fort belle cave tout autant qu'un goût immodéré pour le vin. Pas une foire des vins, pas une vente aux enchères n'échappaient à sa curiosité pour, le plus souvent, revenir de l'endroit avec quelques nouveaux trophées.

Il n'avait hélas guère le temps de laisser vieillir ses trouvailles. Sa réputation avait fait le tour de ce territoire, son adresse passait de bouche en bouche pour peu que celles-ci, se trouvassent le long d'un comptoir. Quelque part, non loin de là, était un brave type, descendant d’Amphitryon lui-même, par la descente de sa cave.

Qui voulait se régaler, non point aux frais de la princesse ; il y avait les vernissages pour cela sans que la qualité ne fusse toujours au rendez-vous, mais sur la bourse de ce mécène des vignerons, il n'était qu'à venir sonner à sa porte, à une heure appropriée. Les rumeurs de cette nature vont bon train, tous ceux qui avaient bon teint se passaient le mot.

Amphitryon savait recevoir. Il est vrai que notre ami avait l'achat compulsif tant pour la dive bouteille que pour les produits alimentaires qu'il avait pris l'habitude d'accumuler sans modération dans son réfrigérateur. Ce petit défaut fit l'affaire des visiteurs à l'improviste, des intrus de l'heure opportune. Ceux-là, la gueule enfarinée, pointaient non seulement le bout de leur nez mais surtout ce curieux orifice qui se situe en dessous.

Notre ami ne savait recevoir sans sa phrase rituelle : « Qu'est-ce que vous voulez boire ! » C'était là le point de départ d'un engrenage, une succession incontrôlée de suggestions diverses qui se terminaient immanquablement par : « Vous resterez bien manger ! ». Naturellement, les visiteurs de faire semblant d'hésiter, de prétendre être attendus avant que de finir par accepter, à contre-cœur feint, ce qu'ils étaient venus chercher.

C'est alors un enchaînement qui tournait immanquablement à la bacchanale. Les uns ouvrent le garde-manger, les autres se proposent de descendre à la cave tout en vidant un premier verre. Le menu se dessinant au gré des découvertes et des dates limites qui convainquent chacun de rendre service. L’incertitude sur le menu, poussait le caviste à remonter les bras chargés d'un vaste choix pour couvrir toutes les éventualités et s'éviter un nouveau voyage

Un autre, s'empressait alors d'ouvrir toutes les bouteilles sorties de leur cachette, afin, prétendait-il qu'elles soient à bonne température. Il ne lui venait pas à l'esprit, qu'elles étaient trop nombreuses même pour des gourmands de leur trempe. Le gaspillage n'avait du reste guère d'importance puisque c'est Amphitryon qui rince.

La préparation se faisait en joyeuse collégialité, l'occasion ad-hoc pour goûter un peu de tout ce qui a été ouvert. Il se trouvait que le contenu de certaines bouteilles déplaisait tandis que d'autres connaissaient un tel succès qu'elles se retrouvaient vidées avant le début du repas. Une nouvelle descente dans la caverne d'Ali Baba s'imposait alors pour le préposé auto-proclamé.

La suite, ne mérite pas d'être décrite. Il se trouve des règles qui supposent la modération et la parcimonie. Ne froissons pas les consciences par un récit qui tournerait à la farce. Le résultat du reste n'est guère glorieux tandis qu'Amphitryon en perd ses mots et sa vigilance. C'est le moment choisi pour ses amis repus et totalement « dessoiffés » pour se retirer tant qu'ils le peuvent encore. Saint Christophe veillera sur eux à leur retour, car, il faut le déplorer, certains prennent le volant.

Un plus roublard que les autres, celui qui assurait les voyages à la cave, pour rendre service, rebouche les bouteilles non vidées et se propose de les finir chez lui. Ceci explique sans doute la lourdeur de sa main. La troupe se disperse tandis qu'Amphitryon ne découvrira que plus tard, que sa cave a encore pris une grosse claque, c'est sans doute d'avoir beaucoup de vrais amis.

À contre-visite

 

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