Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
31 Octobre 2022
Piraterie en eau douce.
S'il est un domaine où le fait du prince demeure vivace dans cette monarchie républicaine, c'est hélas celui des subventions, héritage sans doute des prébendes de jadis. Pour les uns, le maigre denier de l'inculte tandis que pour les autres, des ponts d'or, sans véritable contrôle, comme si, il s'agissait de récompenser ceux qui demeurent fidèles à la ligne politique du donateur. On se goinfre entre canailles tandis que d'autres, qui agissent dans l'ombre et loin des projecteurs, tirent le diable par la queue.
Qui a dirigé une association sait à quel point il est fastidieux de remplir des demandes, d'empiler des pièces justificatives, d'établir des budgets prévisionnels sur le sable mouvant de l'incertain ou l'illusoire puis d'imaginer des critères d'évaluation pour ce qui n'arrivera jamais, faute de la manne espérée. Ce casse-tête est si rébarbatif que beaucoup renoncent à tendre la main, leur sébile restant désespérément vide.
À côté d'eux, des plus heureux, des plus roublards, des moins honnêtes certainement, viennent chercher avec une brouette les sommes considérables qui leur sont généreusement allouées. Qui contrôle, qui justifie les différences de traitement, qui vérifie la véracité du projet ? On peut s'interroger et douter sincèrement de la probité de nos instances en ce domaine
Je n'écris naturellement pas dans le vide. Je sais un projet de plus qui servira de tremplin à quelques joyeux malins, capables de naviguer sur des fonds spéciaux, d'engranger les bénéfices et la couverture médiatique tout en flattant des élus qui ne sont pas dupes mais bénéficieront eux aussi des retombées de la farce. C'est du ruissellement à grande échelle de crue, une belle affaire pour ceux qui ont le bonheur d'être du nombre des valets de nos élus.
Le décor pour justifier l'opération est totalement factice, n'a jamais existé dans l'histoire. Mais qu'importe puisque la caution apportée par les sommes offertes permettra d'établir une première qui si tout va bien sera renouvelée tous les deux ans, histoire d'assurer un revenu pérenne pour les inventeurs de la chose.
La presse s'empressera alors de couvrir l’événement sans jamais s'interroger sur sa légitimité, sur les éventuels antécédents dans un passé qui se réinvente sous nos yeux et à nos frais. La moutarde me monte au nez quand je découvre la complicité des financeurs qui offrent l'argent commun pour une illusion magistralement ficelée.
Ils ne sont certes pas dupes, savent en conscience que tout ceci n'est que poudre aux yeux et combines habiles, mais ils ont eux aussi à y gagner pour justifier des dépenses par ailleurs à fond perdu dans un canal qui ne sera jamais navigable à moins de casser une autre fois la tire-lire du contribuable. Quand les marchands s'accoquinent avec les barons et les grands argentiers, le peuple n'a plus qu'à verser son obole à fonds perdus.
Tout ceci relève du grand art, de la supercherie, du grain de sel qui fait sa route pour assaisonner le vinaigre et la moutarde tandis que les héritiers des raffineurs continuent de se sucrer au passage. La magie du libéralisme est de maintenir à flot des opérations qui sont l'exact contraire de cette doctrine tout en favorisant des gens qui soutiennent cette vision de la société. L'argent public qui va au sport professionnel fonctionne exactement sur ce principe délétère.
Bon vent aux joyeux aventuriers de la subvention. Le coup est parfait, la piraterie a toujours de beaux jours devant elle tandis que les forbans, les poches pleines, boiront grassement à votre santé et à vos frais.
À contre-courant.