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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Le Mage Harry à la Capitainerie

Il fait tout de travers

 

 

 

Il advint qu'un duo qui se lançait dans l'aventure de la chanson souhaita donner de la hauteur à une carrière naissante. Elle chantait, lui l'accompagnait de divers instruments et tous deux reprenaient des succès de la chanson. D'un simple divertissement à l'origine pour agrémenter les soirées entre amis, ils prirent vite le goût du bonheur de se produire en public, rêvant de brûler d'autres planchers que ceux des salons de leurs connaissance.

Quand la bonne fortune ne se mêle nullement de donner un coup de pouce à une carrière, il est permis encore d'espérer l'intervention de la baguette magique du bon Mage Harry. Il n'a d'ailleurs pas son pareil pour mettre sur orbite, les étoiles naissantes, pourvu qu'elles sollicitent son intervention. Avec ce magicien des artistes en herbe, le décollage est immédiat, il suffit de veiller à ne pas se tromper lorsque vous lui formulez votre requête.

Ce n'est hélas pas ce qui se passa pour nos deux amis. Tout débuta avec la chanteuse lorsque chantant un jour dans une charmante guinguette des bords de Loire devant un parterre de dîneurs pas toujours très attentifs, voyant passer le brave Harry, chevauchant un cygne noir, le pria d'intercéder en leur faveur pour évoluer sur une tout autre scène. Le sorcier daigna se pencher sur sa demande et dans l'instant, prononça une formule magique …

Hélas, à l'école des pouvoirs surnaturels, si la formation spécifique est de qualité, les cours de culture générale et les principes élémentaires d'une bonne formation de base ne sont pas traités de la même manière. Notre sorcier défaillant, croyant bien faire, envoya ces deux-là sur une embarcation fluviale naviguant sur la Seine. Les passagers de ce bateau mouche n'étaient pas plus à l'écoute que les clients de l'estaminet.

L'accordéoniste alors de se plaindre que le bruit du moteur couvrait le son de son instrument. Il souffla à l'oreille de Harry que l'attraction réclamait un peu plus de silence. Il ne fut nullement déçu de l'intervention du mage, qui juché cette fois sur un nuage, les envoya au milieu de l'Océan sur un magnifique trois mâts. On ne pouvait mieux faire selon les principes de la locomotion silencieuse.

Une fois encore, nos deux étoiles filantes déplorèrent le peu d'attention du sorcier maladroit. Sur un voilier en pleine manœuvre, le vacarme est assourdissant et quoique l'accordéon fut un instrument à vent, sa place n'était pas sur un voilier datant d'avant sa création. Le musicien voulut souffler dans les bronches de Harry quand celui-ci, s’apercevant de la bourde chronologique qu'il venait de commettre, plaça un clavecin dans les mains du virtuose.

C'est la chanteuse qui en eut le souffle coupé. Voilà un instrument qui ne convenait pas à sa tessiture vocale d'autant que son répertoire avait été considérablement chamboulé par ce saut dans le passé. La dame avait hérité d'un chat dans la gorge ce qui contraria Harry, toujours prévenant, qui, du haut de la vigie, fit apparaître une pie. Un perroquet eut été plus adapté mais le clavecin imposait ce choix. Le greffier bondit sur le pauvre oiseau pour lui voler dans les plumes, lui arrachant au passage sa queue dont hérita dans l'instant le gentil instrumentiste.

La chanteuse de se trouver ridicule flanquée d'une tenue de scène qui était désormais totalement parfaitement décalée. Elle s'en plaignit véhémentement à Harry qui ne sachant que faire pour la satisfaire, la couvrit d'une robe de gala qu'il tailla dans la Perruche volante du grand mât. C'est alors que l'équipage qui jusqu'alors avaient semblé ne rien remarquer de ce manège, se moqua de la pauvrette qui eut droit à toutes sortes de nom d'oiseau dont celui que vous devinerez aisément.

Le musicien, fort peu galant homme dans cet instant précis, se mêlant aux rires des malotrus, provoqua le courroux de la cantatrice. Une tempête éclata entre eux si bien que Harry s'éclipsa, les laissant là, en haute-mer et surtout totalement au creux de la vague. Leur carrière artistique était en plein naufrage.

C'est fort heureusement le Capitaine qui tira la dame de ce traquenard. Il la pria de venir dans sa cabine, la trouvant tout à fait à son goût. Il est vrai que ce grand personnage n'était autre que le flamboyant chevalier François de Hadoque. Il ne tarda pas à l'épouser à bord selon les codes de la marine tandis qu'il ne trouva rien de mieux que de coller au piano de la cambuse le malheureux musicien.

Si l'intervention de cet Harry mage de pacotille ne fut pas ce qu'on peut qualifier de franche réussite, elle changea durablement le cours de l'histoire puisqu'une certaine Castifiore fut une descendante de ce couple qui vécut heureux et eut quelques beaux enfants. Seul celui qui fut son partenaire ne trouva pas cette issue formidable. Il en éprouva certes beaucoup de dépit mais sut rebondir avec une batterie de cuisine dans les mains. Il fut du reste le créateur du célèbre gâteau au café : l'Opéra, nom qu'il choisit en souvenir du temps glorieux où il formait un merveilleux duo sur canapé avec son ancienne partenaire.

À contre-sens.

 

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