Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.
3 Février 2022
Passez-moi Bruxelles.
Le titre fait naturellement référence à une histoire que les moins de soixante ans peuvent difficilement connaître. Il fait référence à une époque lointaine où pour obtenir une communication téléphonique sur un téléphone en bakélite, il convenait d'avoir recours à une opératrice, une demoiselle des postes comme on disait alors, sans soucis de l'état civil de celle qui vous mettait en communication avec un lointain interlocuteur.
C'était un temps où ceci relevait encore du miracle, arrivant rarement tant la chose demandait argent, patience et équipement. Depuis, se parler à l'autre bout du monde est devenu un jeu d'enfant, un prodige à la portée de tout à chacun. Je ne vais donc pas vous importuner avec ce phénomène magique qui permet aux voix d'abolir les distances.
On prétend communément que les paroles s'envolent ! Les écrits quant à eux, restent en rade ou pour être plus précis, ont bien du mal à voyager par l'entremise de la société héritière de la désormais obsolète Administration des Postes, Télégraphes et Téléphones. Si du côté des télécommunications (dois-je vous expliquer le sens de ce vocable jadis filaire ?), tout se passe désormais le mieux du monde, il en va tout autrement pour l'auteur qui aurait la folie de vouloir distribuer ses ouvrages par ses propres moyens.
L'épopée ne manque ni de pièges ni de chausse-trappes. Le livre doit trouver emballage adéquat pour s'épargner les outrages du transport, la chose n'est pas rare tant la célérité est de mise sans souci du respect dû à la chose manipulée. Il est vrai que seule la vitesse compte aux yeux des commanditaires, gens bien à l'abri dans leurs bureaux et qui rémunèrent à coup de lance-pierres des coursiers sacrifiant leurs points et parfois leur vie dans l'aventure.
Ces stakhanovistes du volant travaillent pour une joyeuse ribambelle de sociétés qui brouillent les pistes, empruntent les mêmes véhicules, pratiquent des prix semblables, usent et abusent de la naïveté des commerçants qui découvrent un peu tard que ce service ne leur rapporte que fort peu tout en décourageant les véritables clients. Quant à la Poste, elle s'arrange pour que ces tarifs ne soient pas compétitifs. Quelle honte !
C'est ainsi que l'auteur qui veut expédier son polar en France devra débourser pour « le Bec hors de l'eau », la redoutable somme de 5 euros 91 pour un ouvrage vendu 15 euros. Une sorte de coup de pouce pour favoriser Amazon et son odieuse manière de tuer les libraires. Pire que tout, si le livre transite par la Belgique par exemple, grâce à une mesure pour favoriser le rayonnement de la culture française en Europe, le prix du timbre ne sera plus que de 1 euro 49, somme des plus raisonnable cette fois.
D'où le titre de ce billet. Il est plus judicieux de transiter par l'étranger pour éventuellement renvoyer son livre en France. Les futurs électeurs pourront profiter de cette anecdote pour constater que le rayonnement de la culture nationale sur le territoire français ne préoccupe pas nos joyeux responsables à moins qu'ils ne bénéficient de pots de vin versés pour les bonnes œuvres des différents partis par les bénéficiaires de ce scandale.
Votez si le cœur vous en dit. J'ai le sentiment que vous ferez le choix parmi une belle brochette de canailles. Il n'y en a pas un pour rattraper l'autre. L'essentiel étant de brouiller les pistes, de vendre du vent, de mettre l'Europe sur toutes les sauces avec une petite dose d'écologie alors que tout est fait pour que circulent des livreurs sans protection sociale sur tout le territoire.
Si vous voulez commander mon roman, je vous l'enverrai avec plaisir en Belgique, au Luxembourg, en Allemagne, en Italie ou en Espagne selon ce qui vous arrange. C'est vraiment idiot d'habiter en France si vous voulez me lire. J'oubliais, je ne supporterai pas l'idée que vous puissiez avoir recours à Amazon pour vous le procurer. Je préfère vous l'envoyer gratuitement au format PDF plutôt que de sombrer dans cette extrémité.
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