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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Né sous une bonne étoile

François premier tel qu'en lui-même.

 

Louise de Savoie sa mère sent venir les douleurs de l’enfantement. Son rejeton, elle est persuadée qu’elle donnera la vie à un garçon, sera appelé à un grand destin. Autant que sa naissance soit le point de départ de sa légende. Nous sommes à Cognac, au pays de Mélusine, il est bon de convoquer la bonne fée pour donner à l’heureux évènement des allures de légende.

Louise s’en va donc dans le grand Parc du château, choisit un chêne pour mettre le petit François au monde. Ses douleurs, ses cris ont dérangé une brave salamandre qui avant de quitter la place vient lécher la main du nouveau né. Mélusine s’est penchée sur son berceau, il n’est plus qu’à lui faire boire quelques gouttes de vin de Cognac pour que l’enfant soit élevé en bon cognaçais.

La légende prétend que le garçon, né en 1495, garde très longtemps sa nourrice dans son cœur, au point de faire visite galante et néanmoins coquine à la dame Rabayne qui a justement la nourrice à son service. François, dans la confusion des sens, se trompe de seins, cela peut arriver à tout le monde surtout quand on est devenu dauphin de France.

Une autre visite galante fera grand bruit. Le roi a alors cinquante ans, il est pris par le démon de dix-sept heures. Il enfourche un cheval pour précipitamment rendre visite à la Baronne de Priannac. Il y a quatre lieues à accomplir, de quoi sans doute calmer les premières ardeurs. Pourtant sur sa selle, le galant brûle de retrouver la luronne.

Est-ce l’ardeur qu’il compte mettre à la chevaucher ou bien une maladresse de cavalier, François premier tout roi de France qu’il est ne peut passer le Veyron qui ne doit en rien au Rubicon. Le cheval se cabre, dépose son passager le cul dans la rivière, lui laissant le temps de modérer ses envies tandis que l’animal va dans le pré voisin. Nous sommes juste après le petit village de Cherves et le bouc est bien mouillé.

Le pauvre coquin ne fait guère le fier d’autant que sa délicate posture mettra à mal sa réputation. Quand Pierre, le servant du meunier Maître Michaud, dont la jument qui paissait non loin de là ne serait pas innocente dans l’emportement de l’étalon royal, aperçoit un homme s’offrant étrangement un bain de siège. Il s’en va à son secours tandis que le cheval du baigneur engrosse sa jument.

L’homme tout aussi mouillé qu’embarassé, se présente sous une identité d’emprunt. Il se prétend Comte de Saint-Pôl. un nobliau local souffrant d'hémorroïdes. Pierre s’amuse de la pirouette, lui qui n’ignore rien des secrets de bonne femme. Il sait qu’un marron d’Inde dans la poche soulage ce mal affreux quand on est cavalier. François, né sous un chêne, se contentait de deux glands, bien moins efficaces.

La conversation s’engage donc entre le valet et son prétendu Comte. Après les conseils dont vous venez d’avoir la primeur et quelques banalités sur la pluie et le beau temps, Pierre confie à ce puissant personnage ses déboires d’amoureux éconduit. Il trouve forcément une oreille attentive auprès de son obligé.

Pierre est amoureux transi de la fille du meunier. Hélas maître Michaud, avare et surtout désireux de tirer grande et belle dot de sa fille, repousse les avances de celui qui n’est que son valet. Le faux Comte plaint le pauvre Pierre tandis que celui-ci le conduit au moulin de son maître pour lui offrir vêtements secs.

Le titre de Comte pousse le meunier à se montrer accueillant. Il propose même à son visiteur de partager sa table en compagnie de sa famille. C’est ainsi que le cavalier dans des habits de fortune se rend compte de la beauté de la demoiselle. Il se dit que son sauveur est un garçon d’excellent jugement. Il pousse donc le meunier à parler pour en savoir davantage sur lui.

Grisé par le vin de cognac qu’il a sorti pour l’occasion, heureux d’avoir un personnage important dans son moulin, l’homme laisse libre cours à sa parole. Elle finit par déraper lorsque le Comte lui demande ce qui serait utile à son activité : « Ce qu’il me faudrait, c’est un pont sur le Véron. Mais où trouver l’argent ? Le roi se soucie bien peu de son peuple. La canaille ne songe qu’à son plaisir avec les femmes autour de lui. »

Le faux Comte avale une dernière bouchée et cette remarque qui lui chauffe singulièrement les oreilles. Ainsi donc le petit peuple est au courant de ses frasques. Il récupère son étalon qui lui aussi a bien songé à son plaisir et s’en rentre le plus discrètement possible dans son château avec des habits qui ne sont pas dignes de lui.

Le lendemain, des hommes du château royal arrivent en armes quérir maître Michaud. Ils se montrent assez brusques pour inquiéter grandement le meunier. Quand il arrive devant celui qui l’a mandé, il découvre avec effroi que c’est au roi en personne qu’il a tenu des paroles offensantes. Il se voit déjà jeté dans un cachot pour crime de lèse majesté. De peur il en mouille ses braies, ce qui fait sourire son tourmenteur, lui rappelant sa mésaventure de la veille.

Le roi, bon prince, calme le meunier. Il lui demande s’il tient toujours à son pont. La question surprend l’homme qui a déjà perdu toute contenance. Le meunier se contente d’opiner du chef tandis que le roi, majestueux se lève pour proclamer : « Si tu veux ton pont, il te suffit d’accepter devant moi, le mariage de ta charmante fille avec le brave Pierre, ton garçon meunier ».

Ce qui fut fait selon les ordres du roi. Pierre épousa la fille de son meunier de maître tandis qu’un pont de pierres enjamba le Veron. Si Pierre et sa Jannette vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants et quelques chevaux du roi, François premier, n’eut guère l’occasion de profiter du pont pour rejoindre la Baronne de Priannac. Deux ans plus tard, elle passait de vie à trépas, quoiqu’avec lui on ne sache pas comment écrire le premier terme de cette expression.

Le pont du Roi demeure. Il porte la date de 1547, année de la mort de François premier. Vous le trouverez sur la route de Cognac à Matha pour peu que vous ayez belle à qui rendre visite par là. Évitez simplement de vous montrer trop cavalier avec la belle vous pourriez le regretter.

Cavalièrement sien.

 

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L
Je n'ai pas de belle par là mais j'ai peur de ne pas trouver de train pour le retour, avec des cheminots qui s'arrêtent de bosser quand bon leur semble... Mais j'irai le voir ce oont, pour sûr !
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C
L Hatem<br /> <br /> Les cheminots font le pont <br /> <br /> Vous ne passerez pas