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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Le Lycanthrope de la toile

Les soirs de pleine lune

 

Je vous dois cette confession, ce récit que vous aurez sans doute beaucoup de mal à croire. Je sais que le surnaturel, le mystère et les vieilles croyances n’ont plus guère leur place dans cette société si rationnelle, résolument moderne et scientifique. Pourtant rien de ce qui vous sera livré ici n’est menterie ou extravagance, je vous livre la vérité telle qu’elle est dans sa nudité à la sortie de son puits. Que les sceptiques et les matérialistes de tous grains passent leur chemin !

Tout a commencé pour moi il y a maintenant plus de dix ans. J’avais mis le pied à cet étrange étrier qu’on nomme le Blog. Je me livrai par écrit sans pudeur ni raison, évoquant le rugby, la Loire, l’enseignement et mes périples quand insidieusement a surgi ce curieux phénomène. Habituellement, l’inspiration surgit au petit matin, un mot, une rubrique à la radio, une pensée ou bien même une anecdote personnelle déclenche une logorrhée qui a besoin de ses 5 000 caractères pour se dissoudre enfin.

C’est donc sur une chaise percée que j’évacue ce trop-plein de mots qui se bousculent dans un esprit tourmenté. Jusqu’alors, ce curieux accouchement suffisait à calmer ma folie, à me permettre de vivre convenablement le reste de la journée. J’avais satisfait à ce qui devint bien vite une étrange assuétude, je pouvais vaquer …

C’est alors que certaines nuits, je fus pris de mystérieuses sensations. Quelqu’un sans doute, venait, en dépit de la couette protectrice, me chatouiller les arpions. Non seulement j’étais perturbé dans mon sommeil mais pire encore, mon esprit semblait totalement sous l’emprise de ce mystérieux visiteur. Il me soufflait à l’oreille des propos dont la décence m’interdit d’évoquer ici.

Il me fallait me lever, tenter de me débarrasser de l’intrus. Acouphène ou voix johannique, j’étais comme possédé. Je remarquai bien vite que le lendemain matin, sur mon écran surgissait un texte virulent, violent, machiavélique parfois, agressif ou bien diffamatoire dont je n’avais strictement aucun souvenir. Je voulus en savoir un peu plus d’autant plus aisément que les moyens modernes permettent de se mettre sous surveillance par le truchement de petites caméras espions.

C’est donc ce que je fis, installant un savant système infrarouge à détection de mouvement devant mon fidèle ordinateur. Un mois durant, il ne se passa rien, vingt-huit nuits exactement avant que ne soient capturées de bien surprenantes images. Je surgissais devant mon écran,la face transfigurée, un rictus satanique accompagnant une frénésie d’écriture qui échappait à tout contrôle de ma part. Celui qui était là, qui avait mon allure, ne pouvait en aucun cas être moi.

Je compris l’ampleur du problème quand je parcourus le texte né de cette nuit de pleine Lune, car tel était le cas. Il avait toutes les caractéristiques du brulot, de la diatribe, du pamphlet sans concession qui s’en prenait à quelques malheureuses victimes expiatoires, notables de l’endroit ou personnalités politiques. Je devenais lors du Sabbat, un rédacteur inspiré par Satan en personne.

Voilà, vous savez tout. Le phénomène se reproduit ainsi à la pleine Lune. Une force mystérieuse me pousse à prendre le clavier pour y glisser des horreurs. Après bien des interrogations, j’ai pris le parti de ne jamais censurer ces écrits venus d’ailleurs. Il me fallait simplement vous avertir de leur origine afin que vous fassiez preuve de compréhension.

Chez moi, le diable n’est pas dans les détails. Il prend la direction de mon esprit à fréquence régulière, il impose sa volonté et son style, ses tourments et ses tics de langage. Avec un certain étonnement, j’ai constaté que nous avions tous deux en grande partie, la même manière de manier la langue, de la tordre à notre fantaisie. Vous comprendrez aisément j’espère que c’est là, une fois encore, roublardise du malin pour se dédouaner de toute responsabilité.

Je vous devais cet aveu car quelques personnes ont songé à me poursuivre pour des textes écrits sous la dictée du malin. Elles sauront à l’avenir que je n’y suis strictement pour rien et accepteront bien humblement de pardonner ce pauvre diable qui s’ennuie la nuit. Les loups garous ne hantent plus les forêts obscures, ne se parent plus d’une peau de bête. Ils viennent sur la toile pour effrayer les braves gens, mordre les puissants et hurler avec les monstres. N’en soyez plus surpris, d’autres que moi, sont eux aussi, les interprètes involontaires du malin, les lycanthropes de la toile. Nos chers parlementaires n’ont rien trouvé de mieux que d’associer un terme anglais à la chose, eux dont le diable se plaît à commander chacune de leurs décisions. Quelle douce ironie !

Sénélitement vôtre.

 

 

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