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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Le bateau chinois

Le plus beau des cadeaux

Le bateau chinois

Conte ancestral

 

Il était une fois un grand empereur chinois qui voulut faire présent à ses amis français d’un grand et beau bateau, une jonque merveilleuse. Pour montrer sa puissance et en imposer au Duc d’Orléans, le grand homme ne recula devant aucune dépense. Rien ne serait assez précieux pour ce cadeau qui devait sceller une amitié éternelle. Les bois choisis étaient les plus précieux ceux qui habituellement étaient réservés à la marqueterie. Pour les voiles et les cordages, il exigea une qualité unique, un tissage fin et solide issu des meilleurs chanvres. La coque fut incrustée de dorures représentant le plus splendide des dragons. Tout était en point parfait à l’exception peut-être de sa capacité à naviguer sur une rivière.

 

Lorsque le bâtiment fut prêt, l’Empereur le fit expédier dans la lointaine France en empruntant les routes maritimes. Il fit un long voyage, périlleux parfois mais finit par arriver à bon port, dans la cité johannique. Quelle merveille que cette jonque, le Duc n’en revenait pas d’un tel présent. Il n’avait de cesse de l’admirer tout en ayant un curieux pressentiment ; il ne fallait pas pour lui naviguer sur la Loire avec ce bateau si peu adapté au courant.

 

Qu’à cela ne tienne, le Duc demanda qu’on dépose la jonque sur le canal d’Orléans, son cher canal qu’il aimait tant. Chaque jour, la jonque se rendait de Combleux jusqu’à Pont aux Moines et le Duc, admiratif, chevauchait sur le chemin de halage pour jouir du spectacle et de la beauté de l’endroit. À ses sujets dont certains osaient lui demander pourquoi il ne montait jamais sur l’embarcation, celui-ci répondait toujours qu’elle était si belle qu'il voulait simplement la contempler à plaisir ! Il ajoutait toujours à ceux qui insistaient un peu plus qu’en montant dessus, il ne pourrait profiter de ses courbes majestueuses, de sa ligne gracile et de ce spectacle qu’il chérissait plus que tous les autres.

 

Tout ceci n’était que fantaisie de puissant, il n’y avait pas à s’en étonner. Hélas pour le Duc, l’Empereur envoya un ambassadeur dans la ville pour le renseigner sur le sort qui était réservé à son présent. Le Duc était pris au piège, il devait pour ne pas offusquer son visiteur embarquer sur la jonque tout en cherchant à l'impressionner. C’est ainsi qu’il demanda à son fidèle Capitaine, un homme en qui il avait toute confiance, non pas de prendre l’habituel circuit mais de plonger dans la Loire en prenant le maule : l’écluse à Combleux qui se jette dans la rivière.

 

Embarquèrent ce jour-là tous ceux qui comptent dans la cité, les gens d’importance, les notables et les courtisans sans oublier l’envoyé chinois. Jamais on n’avait vu aussi bel étalage de toilettes et de vanités sur un bateau sur la Loire. Chacun s’efforçant d’étaler sa richesse en se couvrant de bijoux et de parures toutes plus luxueuses et lourdes les unes que les autres.

 

Le saut de la Loire fut ponctué d’exclamations parmi les passagers de la jonque. Le Capitaine faisait le beau, trop content de démontrer à tous qu’il était le meilleur marin de la place. C’est ainsi qu’il perdit de vue l’essentiel et que la jonque devint rapidement ingouvernable. Emportée par le courant violent, alourdie par ses passagers, rendue plus instable qu’elle n’était déjà, l’embarcation alla se fracasser contre le début du duit. Ce fut le naufrage …

 

Il est inutile de nous décrire la panique à bord. Chacun ne pensait plus qu’à sauver sa vie sans se soucier de celle de ses voisins. On se piétinait, on se bousculait, on s’étripait dans un désordre et une férocité indescriptibles. Pourtant, rien n’y fit : ceux qui purent sortir de la trop luxueuse cabine furent incapables de nager dans les flots agités de la Loire. Leurs tenues extravagantes les envoyèrent par le fond et personne pas même le prince et l’ambassadeur n'échappèrent au sort funeste que le Duc avait toujours pressenti. Seul le Capitaine réussit à regagner la rive, se souciant bien peu de quitter le navire le premier.

 

Sur la rive, les serviteurs et les sujets assistèrent impuissants au drame qui se déroula si vite que nul n’aurait pu intervenir de toute façon. La cité fut en deuil, le tocsin retentit dans tout le duché. Il fallut envoyer une délégation en Chine pour prévenir l’Empereur du sort de son ambassadeur et de la fin tragique de son cadeau. On désigna un petit groupe de personnages importants, des gens qui avaient été remarqués pour leurs divers talents afin d’accompagner le Capitaine, seul survivant jusqu’en Chine..

 

Le voyage fut long et pénible pour ceux qui étaient porteurs d’une si mauvaise nouvelle. Ils en profitèrent pour envisager toutes les manières possibles de transmettre ce terrible message à l’Empereur en personne. Chacun d’y aller de sa suggestion qui, à chaque fois, était repoussée par les autres. Tous mesuraient le risque d’être ainsi un envoyé de mauvaise augure.

 

Ils avaient raison d’être préoccupés. L’Empereur eut une réaction à l’image de sa puissance. Il fit saisir sur le champ les envoyés du malheur et exigea que ses soldats leur coupent immédiatement la langue. Il ne voulait plus rien entendre de ces maudits français. Quant au Capitaine, il subit sort plus épouvantable encore, on lui réserva le supplice des huit couteaux. Cette peine consistait à séparer en public les membres du corps d’une personne vivante attachée à un poteau.

 

Le bourreau utilisait huit couteaux qu’il sortait d’un panier. Avec le premier, il évidait les seins. Le deuxième lui servait à entailler les biceps alors que le troisième appliquait le même traitement aux cuisses. Les quatrième et cinquième couteaux étaient employés pour couper les bras au niveau du coude et les sixième et septième à trancher les jambes au niveau du genou. Le huitième couteau servait à trancher la tête ou porter un coup au cœur. Les restes étaient jetés dans un panier de crabes et la tête du pauvre Capitaine fut exposée en place publique.

 

Ainsi se termina le triste épisode de la jonque chinoise. Si ceci n’est qu’une farce, il conviendrait pourtant d’en retenir le déroulement. Les bateaux chinois fussent-ils impériaux ou républicains, n’aiment guère la Loire et ne se manient pas à la baguette. Il serait préférable d’en tenir compte.

 

Prémonitoirement vôtre.

 

Le bateau chinois
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L
Donc la jonque est venue en France par la mer... puis forcément par les rivières jusqu'à la cité johannique... pour couler à la fin dans la Loire !! Soit ! Belle histoire.
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C
L Hatem<br /> <br /> Je n'invente rien c'est un conte traditionnel chinois