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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Faites National

Les lampions, le drapeau et le bal

Faites National

Feu d'actes factices

 

 

Moi qui suis profondément attaché à mon pays et à sa langue, de manière viscérale, j’avoue en contre-partie n’éprouver ni esprit patriotique ni désir de me lever à l’écoute de la Marseillaise. Je perçois ainsi une véritable dichotomie entre l’idée et l’enveloppe, entre les apparences et la réalité. J’ai bien essayé d’aller ouïr quelques discours officiels un jour de fête nationale, et à chaque fois j’en suis revenu atterré et dépité. Comme si ce sentiment amoureux pour un pays, une culture, une histoire avait besoin de ces évocations guerrières, mesquines, cocardières.

Mais pourquoi ont-ils besoin de se retrouver au garde-à-vous, l’âme belliqueuse, la componction citoyenne et l’exaltation de circonstance quand le 14 juillet revient s’afficher au calendrier. Il y a si loin entre ces grimaces mesquines et la réalité d’une Révolution qui au final mériterait d’être reprise au point de départ tant les privilèges, les inégalités, les injustices demeurent flagrantes dans cette nation.

Pourquoi diable s’entourer d’anciens combattants, de décorés de tous poils, de représentants d’une société civile qui oublient désormais de représenter le peuple véritable pour célébrer l’exact contraire de l’esprit de la Bastille. Il devrait y avoir de la joie, de la jeunesse, toutes les strates de la société, des envolées lyriques, de belles phrases et du bonheur dans les cœurs. Au lieu de quoi, les sinistres de service font la gueule, une minute de silence, un coup de clairon et déposent une gerbe avant toutes celles qui seront déversées ensuite lors du bal des pompiers.

Les lampions ne sauvent pas la mise. Le feu d’artifice place justement le public au simple rang de spectateurs hébétés par les lumières et le bruit alors qu’ils devraient être acteurs d’une liesse collective qui s’exprimerait notamment par la mise au ban des ci-devants qui trônent dans les tribunes officielles. Nous ne faisons pas National, nous sommes un peuple de moutons qui se rangent docilement derrière ceux qui les ont toujours envoyés à l’abattoir et désormais les ponctionnent de taxes et d’impôts que nous serons bientôt les seuls à payer.

L’esprit de la Révolution n’est pas et ne sera jamais dans ce défilé militaire sur les Champs Élysées sous la présidence d’un guignol exotique, qu’on renouvelle chaque année au gré des besoins, des flatteries ou des commémorations. Le peuple derrière les barrières, bien rangé, bien gardé, c’est l’exact contraire de cette fête que nos nouveaux monarques ont détournée sans vergogne. La garden-party, thème ignoble et anglophone était alors le paroxysme de l’usurpation et de la forfaiture de ceux qui se commettaient là.

En prime, la liste des récipiendaires, nouveaux bénéficiaires de la rosette, était à elle seule un outrage à la République, aux héros véritables et au peuple de France. Les copains, les coquins, les artistes, les bienfaiteurs, les amis étrangers se pressent à la queue-leu-leu pour ce charmant colifichet de l’orgueil, de la vanité et de la prétention de classe. Robespierre et Danton s’arracheraient les cheveux dressés sur la tête qu’ils n’ont plus !

Oui si pour faire National il faut adhérer à cette mascarade, à toutes ces simagrées déplacées, vous ne me verrez pas dans vos célébrations oiseuses et sans sincérité aucune. L’esprit ne souffle plus, la devise de la République n’a jamais été autant galvaudée que depuis quelques temps. Des hommes en armes, portant tenue de guerre sont censés encadrer la fête, lui donnant ce je ne sais quoi de morbide et de pitoyable qui brise le rêve et la signification de la date.

Le Président avance sur les pavés, lui seul se souvient alors de la réalité de la première commémoration en 1790, il se prend pour l’Être Suprême, le nouveau monarque et le représentant de la grandeur nationale incarnée dans son immodeste personne. C’est à pleurer de stupidité, de cérémonial honteux, de décorum déplacé. Je préfère comme l’ami Georges, rester dans mon lit douillet : la musique qui marche au pas, ça ne me regarde pas et le clairon sonne si faux les jours de liesse fictive.

Révolutionnairement vôtre.

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