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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Le référent ne fait plus référence.

Retrait sans ordonnance.

Le référent ne fait plus référence.

Pas de médecin traitant, plus de traitement.
 

Voilà, c’est fait ; mon médecin traitant, et néanmoins référent, vient de mettre la clef sous le paillasson pour jouir, à son tour, d’une retraite méritée. Je reste le bec dans l’eau, sans solution de repli. Il n’y a plus de généraliste disponible dans notre belle ville, si proche de la Capitale, que les jeunes loups de la faculté préfèrent à l’austère cité Johannique, à moins qu’ils n’aillent chercher le soleil du grand sud.

Que faire désormais ? Renoncer en dépit de l’obligation légale qui m’est faite de désigner un médecin référent pour accéder à la jungle des spécialistes cupides ? Battre la campagne avoisinante pour trouver la perle rare, le jeune praticien qui voudrait bien se charger d’une vieille baderne ? Accepter d’attendre des heures dans les maisons médicales impersonnelles des quartiers périphériques ?

L’ordonnance est dure à avaler, la potion est amère, et désormais, je vais devoir me contenter, comme tant de mes concitoyens, de faire le siège des urgences au moindre dérèglement intestinal ou la première angine venue ! Qui a conçu ce plan machiavélique pour détruire le système de santé national par l’asphyxie des généralistes ? Quel imbécile a décrété ainsi de pousser l’absurdité à ne faire qu’une médecine de spécialistes, attirés surtout par les gains financiers ? Qui a signé ma mort certaine par carence médicale ?

La santé publique, nos responsables n’en ont cure. Le sujet a tout juste été évoqué lors de la dernière élection lorsqu’un candidat avait dessein d’abattre la Sécurité Sociale. Il a dû faire machine arrière, sans que les autres nous expliquent pourquoi défendre ce qu’ils détruisent méticuleusement depuis tant d’années. L’hypocrisie est la règle du jeu en la matière.

Les électeurs n’ont pas besoin d’une piqûre de rappel. Ils ne trouvent plus de médecins pour prescrire la chose. Le cercle vicieux de la désertification médicale va de pair avec la financiarisation des cliniques et maisons de retraites. Quelques jolis salopards, prétendument actionnaires, sont là pour faire du fric sur la maladie, la vieillesse et la mort avec l’odieuse complicité des pouvoirs publics. L'hôpital public est désormais en état de mort clinique, la belle ironie que voilà !

Se soigner est devenu, non seulement un casse-tête impossible, mais aussi et surtout, un gouffre financier. Que les salauds de pauvres aillent crever en silence loin des centres-villes et de ceux qui instrumentalisent la santé ! C’est un recul sans précédent de notre société ; avec la complicité des élus, des institutions, des partis politiques et de nos chers carabins, toujours plus experts en dépassements astronomiques.

Je ne vais plus me soigner, à moins que je me contente d’auto-médicalisation ou d’alternatives douces. C’est bien le but recherché ; et je ne vais pas pleurer pour trouver celui qui voudra bien prendre en compte mon cas, si précieux à mes yeux. Plus de médecin traitant, personne pour prendre le cabinet de celui qui avait fini par n’être plus qu’un prescripteur de médicaments, expédiant les patients à une cadence folle ; je ne serai pas mieux ausculté demain qu’hier. Tout va bien pour moi, merci bien !

Pour les inquiétudes secrètes, les maux qui me tracassent, les douleurs insidieuses, je ferai comme tout le monde : une consultation virtuelle sur un site médical qui me donnera un diagnostic incertain, pour me rassurer, m’inquiéter ou bien simplement me fournir une réponse purement aléatoire. Savoir ou faire semblant de savoir devra suffire à me mettre sur la voie de la guérison.

Pour trouver des médicaments un peu plus efficaces que ceux qui me sont autorisés dans notre bonne pharmacie, j’irai faire mes achats sur la toile, sur des officines douteuses, étrangères et non certifiées. Bienvenue dans la jungle ; l’avenir est incertain, la vie ne tient qu’à un fil, et plus personne ne veut prendre en charge le risque de suivre mon dossier médical.

Le conseil national de la Résistance est mort et enterré. Le petit banquier veut soigner le pays à coups d’ordonnances. La belle farce que voilà pour ces milliers d’individus qui, comme moi, n’ont plus accès à ce petit papier blanc, rempli d’une écriture illisible, pour rendre visite à la pharmacie du coin ! Le pays est bien malade, la purge s’impose, et elle passera par l’austérité médicale.

Ordonnancement sien.

Le référent ne fait plus référence.
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