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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Quand le vin s'est tiré …

Un bandit de Grand Chenin ...

Quand le vin s'est tiré …

 

Il ne faut plus le boire !

 

 

Il y a seize mois j'écrivais un texte pour célébrer le merveilleux vin que faisait alors mon ami Édouard. Dans son domaine qui surplombait la Vienne, il produisait un « Chenin » si particulier que je ne pouvais que m'incliner devant son savoir-faire et m'enthousiasmer pour le nectar qui sortait de ses vieilles barriques.

 

Le temps passa, Édouard vendit son domaine en un marché définitif qui le contraignit à faire définitivement le deuil de son passé viticole. Il conserva quelques bouteilles et partit sans espoir de retour. Le domaine changea de nom, d'ambition sans doute et, à coup sûr, de philosophie. Ce qui existait avant relevait de l'alchimie improbable, du miracle d'une fermentation qui prenait son temps. Il faut céder maintenant aux impératifs de la science œnologique.

 

Chacun est maître en son domaine et je ne me permettrais pas de reprocher au nouveau propriétaire un changement de cap. Le petit-fils de l'amiral avait une conception très particulière de son métier de vigneron, le nouveau propriétaire rêvait d'une bifurcation radicale et ne se voyait pas emprunter les pas du petit homme souriant et malicieux. Cependant, je reçus un message par le truchement d'un tiers afin de m'enjoindre de modifier le contenu de mon billet d'alors « Édouard aux vins d'argent ! »

 

J'avoue ma surprise à la lecture de ce premier message et ma réaction ne fut pas très amène. Comment modifier un texte paru il y a si longtemps sur une toile qui voue à l'éphémère ce que nous pouvons y confier ? Je pouvais certes retrouver le texte sur mon petit site personnel mais ailleurs, il m'était particulièrement compliqué de remonter ainsi le temps et pour quelle raison d'ailleurs ?

 

J'appris alors que le nouveau propriétaire était particulièrement excédé de recevoir sans cesse des appels se réclamant de mon écrit pour obtenir quelques flacons précieux. C'était sans doute fort exagéré ; je doute que des lecteurs se perdent encore dans les méandres de ma production pléthorique pour retrouver ce récit en particulier.

 

Le ton monta avec le truchement du nouveau viticulteur. Je reçus un message d'une virulence détestable, me prenant d'une part pour un journaliste, ce qui n'est pas de nature à me plaire et usant d'autre part d'un ton que je ne goûtais guère. Je fis cette petite modification si gentiment exigée par mon interlocuteur tout en doutant qu'elle soit efficace et utile. Puis, après réflexion, je décidai de vous informer avec fracas que le château de la Trochoire est mort et enterré.

 

N'espérez plus profiter de ces vins uniques qui se fiaient au hasard et à la bienveillante nature pour devenir des trésors. Maintenant, la production sera maîtrisée, scientifiquement contrôlée, rigoureusement suivie et se passera de la poésie du brave Édouard. Ne contactez plus le nouveau propriétaire pour ce qu'il ne souhaite manifestement pas produire.

 

Quant à vous donner le nouveau nom du domaine, ne comptez pas sur moi. Il me serait encore reproché de provoquer une vague d'appels importuns, des demandes déplacées et exaspérantes quand on se fait fort de pratiquer un commerce dévolu à l'exportation. Je vous en conjure, n'appelez plus le château La Trochoire, il n'existe plus !

 

Voilà j'ai rempli ma mission, j'ai apporté cette correction qui s'imposait. Le vin s'est tiré ; il ne faut plus le boire. Édouard a rendu son tablier ; il se consacre désormais au théâtre avec ses amis artistes. Laissons les marchands tranquilles, ils n'ont pas besoin d'être dérangés par le menu fretin. Il y a sans doute de par notre grand pays viticole, quelques producteurs à découvrir qui méritent votre visite.

 

Àvotreservicement vôtre.

 

Le petit échange qui a prévalu à ce billet :

Premier message

 

monsieur,

Le château de la T.... ayant changer de propriétaire, nous vous invitons à modifier votre publication concernant le vin produit en ces lieux (article intitulé : "Edouard aux vins d'argent"
Le nouveau propriétaire est monsieur R... B...

 

Ma réponse maladroite

 

Monsieur

 

Cet article est passé, il relatait une visite vieille de deux ans.Je ne vois pas l'utilité de modifier ce récit. Demanderiez-vous à un journaliste de refaire son papier ? Si je viens visiter votre château, je referai peut-être un billet

Merci

La réplique

Bonjour,

Je n ai de conseil à donner à personne, mais quand j ai un ami qui passe sa journée au téléphone à dire " il n habite plus ici merci; l article que vous avez lu est obsolète..." je me sens en droit d'essayer de faire au mieux. Je comprends parfaitement que le droit des journalistes doit dépasser le bien être des gens... Libres à eux d en être juge. Mais un simple rajout précisant : " ce monsieur n est plus propriétaire aujourd'hui" aurait suffit... Inutile de scander de grand principe. Je ne m inscris pas dans une logique de combat, j'ai autre chose à faire. Ne voyez pas là une agression, là où je cherche à rendre service... Sinon il ne faudra plus vous étonner que de plus en plus de monde vomisse la presse.

Merci pour avoir pris la peine de répondre.

Cordialement,


 

Le point final

 

Monsieur,

Il eût été simple de préciser le contexte

Je m'en occupe demain.

Voilà, ce monsieur est servi. J'apporte une modification cinglante à mon article. Le vin d'argent d'Édouard n'est plus. Ne l'oubliez pas.

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K
On ne peut leur donner tort sur les journalistes. Je crois que de plus en plus de personnes ne peuvent plus les voir en toile. C'est tout l'amalgame: dans la tête de ce nouveau propriétaire vous êtes transmué de blogueur en journaliste.<br /> Ensuite, en ce qui concerne leur vin, peut-être sera t'il meilleur que celui d'Édouard, ou du moins tout aussi bon.
Répondre
C
Kakashi<br /> <br /> Recevoir très souvent des appels pour le vin devrait être un honneur si ces gens voulaient vendre leur vin aux clients du coin Mais ils semblent avoir une ambition à l'exportation ...<br /> <br /> Les journalistes ne sont pas mes amis, vous le savez bien