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Chroniques au Val

Ligericus sum, nil Ligeris a me alienum puto.

Au secours !

C'est notre langue qui se noie …

Sur la plage surveillée de Mimizan dans les Landes, les maîtres nageurs secouristes s'affairent plus que partout ailleurs. La baignade est dangereuse, la mer souvent forte, les courants piégeux et le drapeau jaune flotte la plupart du temps. Je ne peux que louer le professionnalisme et le sérieux de ces jeunes gens qui scrutent sans cesse l'Océan, n'arrêtent pas un seul instant de recadrer les imprudents et de donner conseils et recommandations.

Mais un petit détail attire mon attention, un rien, une broutille pour tous ces braves gens allongés benoîtement sur le sable. Nos amis les CRS sauveteurs sont, cette année, équipés d'une planche de secours, une sorte de long surf afin de venir en aide à l'imprudent emporté par une baïne. Mais sur cet objet, sans doute financé par la municipalité, le conseil général ou régional, une inscription en grosses lettres, pour signifier à tous son usage : « rescue ! »

J'enrage ! Ainsi, « secours » eût été déplacé dans ce lieu réservé aux touristes ! C'est une preuve de plus de la désertion de nos institutions dans la défense de notre patrimoine commun : notre langue. On me rétorquera que c'est ainsi que chacun peut comprendre le message et que les étrangers, nombreux sur la côte landaise, seront plus aptes à en comprendre la signification.

Balivernes que tout cela ! Il faut, partout, céder à ce que l'on pense être une mode et qui, en fait, est un envahissement en règle, sournois et méthodique, d'une langue hégémonique au service d'une idéologie désastreuse. Il suffit de regarder sur cette même plage : le loueur d'engins de loisirs n'affiche aucun terme en français. Pour qu'une activité soit « tendance », il lui faut une désignation anglo-saxonne. C'est une réalité indéniable.

Pire, les pêcheurs pratiquent, eux aussi, des activités qui ont recours à cette langue invasive. Il n'y a plus aucun secteur qui échappe à cette invasion mortelle. Je vous fais grâce des médias qui se vautrent dans le jargon et les américanismes de bon aloi. C'est systématique, c'est un armistice sans conditions que la France, une fois de plus, a signé avec l'ennemi.

Je lutte pour maintenir à flot les termes de notre belle langue qu'on galvaude, qu'on renie, qu'on repousse avec dédain au profit de termes plus sonnants et moins riches. L'anglais fait son trou et dévaste notre lexique. Nous sommes une nation en voie de colonisation linguistique avec l'assentiment des élites, les premières à collaborer à ce séisme cataclysmique.

J'en veux pour preuve nos amis photographes qui ne vont plus sur la plage pour admirer un coucher de soleil mais se gargarisent du mot « sunset » qui me hérisse le poil. Pourquoi tant de renoncements ? Quelle est donc la faute primordiale qu'a commise le français pour être ainsi banni par ses propres locuteurs ?

Sa richesse sans doute décourage ces gens qui se ruent dans la facilité et ce créole saxon de bas étage. Je découvre chaque jour davantage le recul du vocabulaire chez mes concitoyens, bien préparés au grand sot (pardon saut) linguistique par des émissions toujours plus abêtissantes et à la langue d'une affligeante simplicité. Il faut que le grand marché transatlantique passe et l'idiome de l'oncle Sam a été envoyé en éclaireur pour vider les cerveaux.

Continuez donc à user de l'anglicisme, vous êtes si intelligents, si modernes, tellement à la pointe de la nouveauté ! Nos cousins québécois doivent s'amuser de notre naufrage, eux qui ont toujours lutté, becs et ongles, pour conserver la langue de leurs ancêtres. Ils écrivent « arrêt » sur leurs panneaux hexagonaux quand en France, le « stop » est plus parlant aux moutons que nous sommes …

Alors, en cas de péril, nos amis les sauveteurs de Mimizan iront à la rescousse d'un nageur en perdition, ignorant tout du sens de ce joli mot bien trop obsolète pour qu'ils en connaissent le sens. Sur le « long board », en lettres bien visibles, ils s'affichent comme des hommes modernes. Au secours, c'est notre langue qui coule et vous lui tournez le dos !

Secourablement vôtre.

Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
Au secours !
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L
Billet indispensable ! Ne pas tout mélanger: s'il est indispensable d'apprendre une langue étrangère et de bien la connaître , l'aimer , en comprendre les arcanes, enrichir sa pensée de cette manière, ce n'est pas une raison pour galvauder sa langue maternelle en y important des termes douteux et approximatifs qui relèvent du snobisme, de l'ignorance et de l'indigence d'esprit. <br /> Je vous mets un lien précieux concernant un universitaire que j'apprécie énormément :<br /> http://www.legrandsoir.info/L-alienation-linguistique-chroniques.html
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C
Laure<br /> Merci pour le lien<br /> Nous sommes en train de nous laisser déborder par une langue dont le seul but est de favoriser une idéologie du fric et du commerce. Nous sommes des moutons bientôt bêlant en anglais de boutique !